Le paysage défilait péniblement devant moi, entre les arbres morts et la terre poudreuse, je ne distinguais rien d'autre que le vide. Un vide sombre et total qui passait derrière les branches tortueuses des centenaires. Je courrais aussi vite que mes membres me le permettaient. Mes coussinets heurtaient silencieusement le sol, ma truffe se levait et sélectionnait une à une les odeurs, afin de trouver la bonne; mielleuse sans être trop sucrée.
Mon corps se figeait, mes griffes sortaient et mes babines se retroussaient. Les oreilles en arrière, je me préparais à bondir sur ma proie. Mes pensées plus sanguinolentes les unes que les autres se chamaillaient pour trouver la plus immonde et tordue d'entre elles. La souffrance était ma raison d'être, la peur, mon oxygène et le sang, ma vie.
Mes pattes se tendirent après avoir étaient pliées sous la puissance pour sauter dans un grognement inhumain. A ma grande surprise, mes coussinets se posèrent sur un sol dur et frais. Ma truffe collée dessus, je compris que l'odeur de miel venait d'ici, de ses pierres aussi centenaires que meurtrières. Il ne me fallut que très peu de temps pour comprendre; la crypte de la fièvre. Mes pensées se mirent à rire. Comment être changée en meurtrière lorsque la soif de sang vous habite déjà ?
Je cherchais encore, convaincue qu'une quelconque nourriture se trouverait non loin. Je humais l'air en piétinant les alentours lourdement. Le plaisir de chasse; l'excitation et la faim réunies en un seul et même but. De minuscules bêtes trottinaient dans les environs, mais rien d'assez délicieux ou intelligent pour moi et ma passion du meurtre. Les femmes araignées se tenaient à l'écart de ce lieu, faisant du sur place quelques kilomètres plus loin dans leurs toiles. Je les entendais, grincer des dents et tisser leurs toiles. Mes prunelles d'ors suivaient le moindre mouvement alors que mes côtes étaient secouées de soubresauts sous ma recherche de nourriture. Soudain elle se focalisèrent sur un point, mes oreilles se dressant automatiquement dans le même sens, pour comprendre. Mais ni ma vue ni mon odorat étaient assez puissants pour savoir ce qu'il se passait.

Enfin, une proie digne de moi et ma folie. Une jeune louve semblait avoir eu l'imprudence de pénétrer ici. Sans doute pour voir ce lieu mystique aux pouvoirs abominable et horrifiant, une jeune abrutie qui pense être libre et forte. Diable, qu'elle avait tort, pourquoi ces jeunes n'écoutaient-ils jamais ? Intérieurement, je souriais. Dévorer des chairs tendres était mon passe temps favoris, un culte digne des enfers les plus horrible qu'il soit.

Lentement, mes muscles se crispèrent dans une douleur réconfortante pour s'approcher sans un bruit de la douce. Elle humait l'air comme une inexpérimentée, ce qu'elle devait être puisqu'elle n'avait même pas pris soin de cacher cette odeur délicieuse de jeunesse et de beauté qui coulait dans ses veines. Aussi agile et discrète qu'une vipère, je me dirigeais vers elle. A quelques mètres, j'entendais son adorable coeur battre, à un mètre, je sentais son poil secoué par la brise, à quelques centimètres, je m'apprêtais à bondir pour lui arracher la jugulaire. D'un pas cadencé par la détermination, elle s'était mise à trottiner vers l'établissement avant d'y pénétrer. Un filet de bave glissa de mes babines encore crème dans un grognement inaudible. Je la suivais, à bonne distance pour ne pas être remarquée.
Elle guettait tout de même les environs, la petite. Je devais jouer à cache-cache entre les colonnes de pierres abimées et les tombeaux de marbres gigantesques et hanté. A tourner en rond, mon coeur attrapa le vertige, mon sang ne fit qu'un tours. Je grognai et me jetai sauvagement sur elle, sous ses pupilles écarquillées d'effroi, sur sa gorge tendue par la peur. Mes canines déchiquetèrent son artère sans peine, l'écrasant sous de mélodieux craquements jusqu'à ce qu'elle ne se débatte plus de ses griffes coupantes. Je serrai la mâchoire une dernière fois, comme pour m'en assuré et commençai les festivité. J'attaquai les entrailles, mon coin préféré pour débuter un bon repas; de la viande moelleuse et juteuse à souhait. A mon grand étonnement, le corps de louve qui se trouvait devant moi était devenue humain, mais de quoi allais-je me plaindre ? Il sera d'autant pus facile à manger. Je senti ses côtes craquer longuement avant d'atteindre ce petit coeur encore chaud et gonflé de sang. Les longs cheveux de la damnées me chatouillaient le museau, me secouant d'éternuement terriblement agaçant qui résonnaient inlassablement dans la pièce.

Soudain, quelque chose secoua le corps encore chaud, mais mort qu'étais mon repas. Je me redressai sur mes pattes, en moins de deux avant de fixer cette personne étrange devant moi. Encore un gosse innocent, je n'avais presque plus faim, mais un joueur de plus était toujours le bienvenue.
Ma fourrure crème était couverte de sang mielleux, je me métamorphosai sans peine dans plusieurs craquement hideux, laissant mon corps nu comme seul tableau devant cet inconnu. D'un revers de main, j'étalai ce liquide pourpre le long de mon cou avant de passer ma langue sur mes dents.

Bonsoir jeune inconscient.

Bonsoir jeune inconscient.

Provoquant un sursaut de l'humain ces mots avaient résonné clairement dans l'enceinte close qu'était la petite bâtisse. Malgré le peu de vêtements que portait Bill, l'air était étouffante, il faisait bien plus chaud qu'à l'extérieur finalement et des gouttes de sueur perlaient le long de son front. L'information monta d'un seul coup au cerveau du jeune homme : Bill Duff n'était pas seul dans cette crypte. Qui était-ce ? La voix paraissait féminine bien que sadique. Tâtonnant autour de lui à la recherche de la personne en question, Bill s'aperçut que ce sur quoi il avait trébuché était en réalité une carcasse humaine, du moins ce qu'il en restait. Maintenant qu'il y faisait attention, l'odeur du sang lui montait dans les narines et provoquait chez lui un énorme dégoût.

Bill ne put retenir la bile qui lui sortit instantanément de la bouche dans un brui de liquide s'écrasant sur le sol. Un goût âcre dans la bouche, il s'essuya le contour des lèvres à l'aide de sa manche.

"Qui est-ici ? Faites attention, il y a des cadavres très frais ici.." retint une autre vague de vomissements " Je ne suis absolument pas un inconscient, je ne cherchais que l'ombre de cette petite bâtisse. "

La stupeur provoqué à la sensation de ses doigts se posant sur de la chair humaine était passée. Bill fouilla dans ses poches de pantalon et en sortit un biscuit. Dans ce genre de situation il faisait abstraction grâce à ses gâteaux. C'est à ce moment qu'il le sentit, ce qu'il ressentait au travers de Boulbi. Peu importe où se trouvait la petite boule, elle était effrayée, par quoi ? Comment savoir... L'angoisse commençait elle aussi à gagner un petit le petit humain. L'obscurité y était pour beaucoup, ne rien y voir amplifiait tous les grincements de la chapelle et les bruits des rats envahissaient les oreilles de Bill..

Et il y avait aussi cette personne dissimulé dans l'obscurité, dieu savait quelle créature cela pouvait être. L'idée que ce soit un dragon gardien du bâtiment effleura même l'esprit de Bill. Entrer dans cet étrange bâtiment s’avérait avoir été, de plus en plus, une mauvaise idée.. Ces mains essayant toujours de trouver la présence qui s'était signalée, effleurèrent ce qu'il crut être des cheveux. Bill se raidit et n'osait plus bouger.. Se demandant si ce n'était pas un autre de ces cadavres.

Une douce mélodie s'écrasa sur le sol. Une agréable musique de dégoût éprise passionnément d'une inquiétude certaine, une sensation délicieuse dont les ondes me frappaient. Une petite part de mon ancienne vie criait toujours un peu au fond de moi, comme pour m'empêcher de torturer ces êtres aussi inutiles qu'abominables. Ils n'étaient pas différent de moi, ils n'avaient juste pas le courage d'agir, guidés par leur bonne conduite. Je me mis à rire, un rire faiblard avant de devenir bruyant et sadique, tirant vers le grave. Mes cheveux collaient à mon visage couvert de sang, luisant à peine dans le noir tant l'obscurité prenait le pas sur la crypte.

Qui est-ici ? Faites attention, il y a des cadavres très frais ici... Je ne suis absolument pas un inconscient, je ne cherchais que l'ombre de cette petite bâtisse.

Mes rires se stoppèrent nettement, comme perturbés par des ondes anormales. Mes prunelles sombres le dévisageaient dans l'obscurité, lui et ce minois blafard perdu dans ces immenses ruines. Je ne distinguais qu'à peine les couleurs mais je voyais nettement que ses cheveux n'étaient pas normal. Je m'approchai en silence, il était impossible qu'il s'en rende compte, pour me stopper non loin de ses doigts curieux, qui effleurèrent mes cheveux furtivement. Un gloussement écorcha ma gorge gonflée de sang. Il rongeait un gâteau, une odeur sucré trainée dans la pièce désormais. J'en raffolais, petite, de ces goûts sucrés. Mains rien ne remplacer le goût mielleux et métallique du sang. Je m'approchai encore, le contournant pour mettre mon souffle au niveau de son cou.

La plupart des cadavres sont ici depuis des siècles, il n'y en a qu'un de frais... Mais un autre ne saurait tarder...

Un nouveau rire sadique s'arracha de ma gorge alors que je m'éloignai de nouveau pour me fondre dans les ténèbres . Je passai derrière une colonne abimée afin de rejoindre son côté droit, afin de chuchoter de nouveau vers cet oreilles certainement tendre.

Inconscient...

Petit à petit, mon esprit tortueux de jeu et de chasse reprenait le dessus... Le chat et la souris.... Mon jeu préféré. Je riais bruyamment, mon corps nu se perdant dans ce lieu de pierres et d'âmes mortes. Mon esprit s'égarait lui aussi dans les méandres de la folie, cherchant de plus en plus de moyens de tuer, plus tordu et destructeur les uns que les autres.

Un souffle sur sa nuque.. Un souffle glacial, carnassier, sanguinaire. Une haleine putride mêlant viande fraîche et sang.

La plupart des cadavres sont ici depuis des siècles, il n'y en a qu'un de frais... Mais un autre ne saurait tarder...

Bill commençait à comprendre que l'autre n'était pas une amie. Le rire qui résonna ensuite dans la crypte appuya cette idée. Les mains de ce dernier commençait légèrement à trembler, montrant ainsi la nervosité du petit homme. Si seulement il était doté d'une vision nocturne, peu être aurait-il enfin pu déterminer s'il avait dut partir au courant ou s'il ne devait pas s'inquiéter. Mais peu importait, il était pétrifié et ses membres ne bougeaient plus. Était-ce ça la peur ? Ce sentiment étrange qui vous poussait à faire des choses que vous ne feriez pas en temps normal ? Un sentiment nouveau pour Bill.. Malgré le danger potentiel, la situation lui paraissait assez jouissif, chaque nouvelle chose découverte le rendait euphorique.

Inconscient...

Son sang ne fit qu'un tour. Les cheveux de sa nuque se hérissèrent et ses yeux se révulsèrent. La pointe de peur qu'il avait ressenti avait laissé place à une extrême angoisse. Maintenant, il savait qu'il était en danger, pourquoi ? Qu'avait-il fait de mal ? L'incompréhension de ce curieux personnage se mêlait aussi à l'angoisse et cela faisait qu'il n'aurait pu bouger d'ici pour rien au monde. Sans qu'il s'en aperçoive des torrents de larme commençait à couler de ses joues. Il essaya tout de même d'articuler quelques mots entre deux sanglots :

"Je suis un bon garçon.. Je n'ai jamais fait de mal à personne, pourquoi êtes vous si méchante avec moi ? Vous me faites peur madame... Oui, peur.. Très peur... Arrêtez, s'il vous plait"

Puis les larmes coulèrent de plus belle. C'est cet instant que choisit Boulbi pour reparaître, il ne le sentit qu'une fois dans ses bras. Lui aussi était apeuré, c'était certainement cette frayeur qui l'avait poussé à revenir. Bill se mit à concentrer son ouïe sur ce bruit étrange que faisait constamment la boule de gelée lorsqu'elle était craintive, mélange d'un ronronnement félin et du gazouillement d'un estomac.. Allait-il mourir aujourd'hui ? Dans cette obscurité, voile opaque posé sur ses yeux d'humain frêle et faible. Il ne verrait même pas le visage de son assassin. Cette vision était triste et les larmes coulèrent à nouveau sur les joues du pauvre petit homme..

Une odeur d'épouvante abominablement délicieuse envelopper peu à peu le jeune homme devant moi. Un parfum délicieux décrochant des frissons. La peur. Une émotion intense que nul ne sait maitriser, quand elle vous attrape, elle vous tue sans remords.

Je passai ma langue sur ma canine droite et fouillai l'ombre de la crypte. Mes cheveux collaient au sang dégoulinant encore sur mon menton et mon visage. Je n'avais plus faim, certes, mais j'aimais beaucoup trop jouer pour m'arrêter ici. Lentement, je piétinais silencieusement le sol froid et dur de pierre souillé d'os creux et vide. Une atmosphère pesante régnait sur la pièce, tombant au creux de mon estomac trop plein pour mon corps maigre. Le calme était parfait, ma proie tremblait, je l'avais senti parmi les odeurs infâmes de moisissures et de cadavre. Mes ongles griffaient les colonnes abimées par les années, crissant dans des aigus désagréables. Mon oreille capta un bref bruit, comme une respiration coupée. Je souriais, ainsi, il était encore enfant ? Sa chair n'en serait que plus tendre et savoureuse.

Je suis un bon garçon.. Je n'ai jamais fait de mal à personne, pourquoi êtes vous si méchante avec moi ? Vous me faites peur madame... Oui, peur.. Très peur... Arrêtez, s'il vous plait...

Mon sourire redoubla pour devenir plus sadique avant de se transformer en un rire insoutenable. Je n'avais plus qu'un envie, le dévorer tout cru. Apprendre le goût de ses entrailles enfantines, de son sang et de sa peau. Je m'approchai lorsqu'une masse sombre se déplaça. Intriguée, je m'arrêtais pour observer, intégrant de nouveau le silence dans la pièce. Le son que dégageait cet animal était étrange et inconnu à mon oreille. Je m'approchai lentement pour me positionner en face de mes proies. Ma curiosité maladive d'autrefois prenait le dessus.

Qu'est ce que c'est ?

Ma voix n'était plus aussi menaçante, elle était agressive mais pas meurtrière, juste intriguée.

Qu'est ce que c'est ?


Il l'avait senti face à lui. Son souffle chaud était venu caresser sereinement sa petite main. Que lui voulait cette femme ? De quoi parlait-elle ? Sa gorge se serra, l'air avait de plus en plus de mal à atteindre ses poumons. Bill sentait le petit Blob tout chaud s'agiter sur sa poitrine, cela lui permis de garder les pieds sur terre et de ne pas perdre l'esprit. Comprenant que la femme parlait de Boulbi, il parvint à articuler.

"C'est... C'est.. Boulbi, il est à moi. Je l'aime bien vous savez, il est gentil. Ne me faites pas de mal par pitié, je ferai ce que vous voudrez."

Bill Duff savait qu'il ne reverrait surement pas les rayons du soleil et il se faisait peu à peu à l'idée. Cela se sentait dans la voix de la jeune femme. Joli contraste, sa voix faisait vibrer ce pauvre Bill, elle devait être belle femme alla-t-il jusqu'à penser. Mais il n'oubliait que sa voix lui avait fait vriller les tripes et glacer le sang, qu'elle avait aussi dévorer quelqu'un dans cette crypte. A ce moment là il sentit son haleine, enfin ce qui lui semblait l'être. Elle empestait le sang et la chair.

"Bwark.. Votre haleine me dérange madame." dit-il entre deux haut le coeur.

Ce n'était pas grâce à son courage qu'il avait lâché ses mots. C'était par pur inconscience, une inconscience devant la mort. Après tout, pour Bill la mort ne serait qu'une nouvelle expérience : Ce qu'il aimait par dessus tout.

C'est... C'est.. Boulbi, il est à moi. Je l'aime bien vous savez, il est gentil. Ne me faites pas de mal par pitié, je ferai ce que vous voudrez.

Je penchai la tête sur le côté en plissant dans les yeux dans une mimique aussi drôle qu'improbable, heureusement, l'obscurité était là. Ma langue passa sur ma canine droite. Mes pensées s'entrechoquaient entre d'affreux murmures habituels depuis des années maintenant, ils avaient été mes amis et les plus fidèles. La solitude ne m'avait jamais pesé grâce à eux et leurs boucans incessants. Qu'est-ce que cette chose venait faire dans un monde comme le mien ? Quelle était sa substance ? Etait-elle croquante, ou fondante ? Et la question la plus existentielle; Etait-elle comestible ?
Je salivais d'avance à ce que cette petite boule verdâtre pouvait avoir comme goût.
Je m'approchai un peu plus, si bien qu'elle n'était plus qu'à quelques centimètres de mon visage ensanglanté. Mais avant de croquer, il fallait en savoir plus.

Bwark.. Votre haleine me dérange madame.

Je sursautai. Mon haleine ? Il me fallut quelques minutes pour comprendre de quoi il s'agissait. Que voulez vous, des années de solitude privent aussi de bonnes manières. D'instinct je mis ma main devant ma bouche et sortit en courant pour ouvrir la porte de la crypte, laissant un rayon de soleil brûlant y pénétrer aveuglement. Je sorti, piétinant les sol de mes pieds aussi nus et rouges que mes autres membres.
De l'eau. Il me fallait de l'eau ! Une rivière à quelques pas de là m'attendais tranquillement, sans attendre je sautais dedans pour me débarbouiller et me rincer la bouche.
Des feuilles de menthes n'étaient pas loin, parfait, j'allais enfin être à peu près présentable, pour une fois depuis une éternité. J'allais être présentable pour le dévorer tout en entier, mais de manière plus raffiné cette fois.