C'était une journée calme au bord de la falaise, le vent soufflait à peine et la température était agréable, mais c'est ce même jour que son grand ami Thïrion fut assassiné. Une journée où il porterait dans son cœur le dernier sourire de son meilleur ami, ses dernières paroles et tous les souvenirs qu'il avait vécus avec lui... De tous les sentiments qu'il pouvait ressentir à cet instant, le premier qui le frappa fut le désespoir, ensuite vint le sentiment d'incompétence, le regret et la culpabilité. Les larmes au creux de ses paupières glissèrent le long de la peau rugueuse du nain pour terminer leur sinueuse route dans l'épaisse barbe noir de jais de celui qui pleurait son ami défunt. C'en était fini de Thïrion et de sa bonne humeur... Gloisin n'avait plus que ses yeux pour pleurer et ses haches pour se venger. Se venger, oui, les lames de ses haches se souvenaient encore des coups puissants portés par la rage et la tristesse ! Le corps gisant du criminel en était la preuve, tranché de toute part, il baignait dans son sang à quelques mètres d'eux. Gloisin se remémorait la scène... Lorsqu'il vit Thïrion tomber en avant un couteau planté dans le crâne, il s'était retourné derechef et manqua de peu le deuxième projectile qui se perdit dans les profondeurs des falaises. Cette sensation de froid intense qui déchira sa peau au contact de l'acier libérant un filet de sang teintant sa joue de rouge, il s'était levé en brandissant ses deux haches qu'il portait aux hanches ! Décidé, il avançait vers l'homme de petite taille tout de cuir vêtu, son visage caché par des bandages crasseux et abimés. Les yeux bleus de celui qui semblait bien trop jeune pour mourir n'eurent le temps que de contempler, abasourdi, les deux haches se planter dans le creux de sa cage thoracique. Enveloppé dans un voile de chaleur, il ressentit ensuite le froid l'envahir et sans un mot, comme l'ombre de la mort, son âme s'éteignit sous les coups qui suivirent. Thorïn n'était pas mort en combat, mais Gloisin lui dressa au bord de la falaise une sépulture digne d'un ami qui avait partagé bon nombres d'années à ses côtés... Il s’éloignât de la falaise, le dos tourné à la tombe qu'il avait creusé de ses mains. La nuit tombait et la douce clarté lunaire naissante se reflétait telle une caresse sur la lame de la hache qui ornait la tombe. "Thörin, mon bon ami, tu resteras à jamais le nain fort et fier que j'ai connu. Puisses-tu reposer en paix maintenant que ta mort est vengée."
G. Stonehelm Brynjolf