Cette journée s'annonçait prometteuse. Peu après l'aube, je me levais, mon bivouac se trouvant au pied d'un bosquet qui m'avait servi d'abri pour cette nuit. Je vérifiais mes provisions. Il me restais de la viande pour deux jours, de la bière pour trois, quatre en me rationnant, et des fruits pour quatre. Je pris quelques framboises et myrtilles pour le petit déjeuner et me mis a retresser ma barbe. Après deux essais, je parvins enfin à obtenir trois tresses correctes et me mis ensuite à affuter mes haches.

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Une fois celle-ci prêtes, je rassemblais mes affaires, mis l'une des haches sur mon dos et pris l'autre à la main. Je repris la route vers l'Est. Un vent moyen soufflait de face vers moi et il n'y avait pas un nuage dans le ciel. Cette journée s'annonçait vraiment magnifique

Après quelques heures de marches, j'aperçus de la fumée qui se rapprochait. Instinctivement, je sortis ma seconde arme et cherchais un couvert. Repérant une butte, je me précipitais vers elle, sans me rendre compte que ma gourde de bière était tombée par terre. Je jetais un coup d’œil derrière et la vis. Je fis demi-tour, espérant la reprendre et pouvoir me mette à couvert. Trois jours de marche sans bière auraient été insupportable. Le vent ramena la poussière soulevée par l'être qui se rapprochait de moi. Je ramassais ma gourde, fermai les yeux et hurlai dans le vent:
"Allez! Approchez un peu! Venez tâter de mes haches!"

Je vis alors l'individu responsable de ce....foutoir. Un elfe! A le regarder, ce n'était qu'un gamin, pour quelqu'un de sa race. Je me détendis un peu, sans abaisser totalement ma vigilance. Je me redressais, et m'approchais lentement, tout en restant bien hors de portée de ses dagues. Je lançai alors:
"Eh ben gamin? Qu'est-ce que tu fous là. On est pas vraiment dans l'une de tes petites forêts. Tu devrais pas être en train de faire des nattes à un poney? Fais attention avec tes cures-dents, tu pourrais te blesser."

Je dois avouer ne pas m'attendre à ça. Je pensais plutôt tomber sur un bestiau un peu plus gros. Et voilà que je me retrouve avec un elfe sur les bras. Cette journée avait pourtant bien commencée... Bon, qu'est-ce que j'vais en faire maintenant?
Bon j'suis pas dans la merde là. Qu'est-ce que tu fabriques dans la région? J'vais pas te manger tu sais. T'as rien a part la peau sur les os.

J'attendis sa réponse patiemment, tout en restant vigilant, observant ses moindres mouvements, parant à toute possibilité d'attaque de sa part. L'elfe avait la peau sombre, de la sueur lui parcourait le corps. Il était fatigué et il pouvait réagir de n'importe quelle façon. Restons prudents. Je raffermis mes prises sur mes armes et patienta

Amrod fixait le nain de ses yeux bleus contrastant avec la noirceur de sa peau.
Après l'avoir entendu parler, l'elfe se redressa, bien droit, sa dague toujours en main. Son expression s'était détendue, mais son regard restait froid. Tout comme le nain, il était encore sur ses gardes. Cependant, étant un elfe, il se savait plus prompt, plus apte à agir avec rapidité. Si cela tournait vraiment mal, il pourrait probablement fuir sans trop de problèmes. Ses yeux de glace se plissèrent légèrement après les paroles du nain, qui décidément, faisait honneur à son peuple. Amrod ne lui fournit pas une réponse qu'on aurait attendu d'un elfe.

"Je sais parfaitement où je suis, l'nabot. Et désolé de te décevoir, mais on a pas tous cette passion de faire des nattes à longueur de journée..." dit-il en avisant de façon évidente la barbe tressée de son interlocuteur.

Sa voix cristalline était calme, sans la moindre animosité. On sentait juste qu'il n'était vraiment pas le genre d'elfe à "faire des nattes". Il afficha même un léger sourire narquois. Redressant d'un geste machinal le bandeau rouge sur son front, et qui se perdait ensuite dans ses mèches noires, l'elfe pointa ensuite, de façon totalement non agressive, la lame de son poignard dans la direction du nain, sans perdre son sourire.

"Mes cures-dents ont eu raison de plus d'un importun au cours de ma vie, le nain. M'enfin, je suppose que t'es bien placé pour savoir qu'il ne faut pas sous-estimer quelque chose de petit, hein ?"

Ceux qui aimaient parler, Amrod aimait leur répondre. Surtout s'il s'agissait d'un nain, tiens. Susceptibles, les nains, d'après ce qu'il savait sur eux. Mais pas de mauvais bougres, comme par exemple celui-ci. Ses haches étaient intimidantes certes, mais l'elfe ne les avait vraiment craintes qu'au premier instant où il les avait vues. Et où le nain avait hurlé comme un bourrin, évidemment. Qu'est-ce qui lui avait pris, au fait ? Amrod était tout simplement tombé, et aurait sans doute un bel hématome à l'épaule sur laquelle il avait atterri. Mais ce n'était pas une raison pour hurler, quoi.

Lorsque j'entendis sa réponse, je crachais par terre et me mis à rire:
"T'as d'l'humour mon gars. En effet, je suis bien placé pour savoir qu'il ne faut rien sous-estimer. Tu essaies sans doute de jouer de la provocation mais...ça prend pas avec moi. déclarai-je un sourire aux lèvres.Mais on en revient à ma question initiale: qu'est-ce qu'un elfe fait en territoire humain. Je vais de suite couper court à ta question me concernant, qui sera la même que la mienne. Je suis un grand amateur de voyage et en ce moment même, je suis sur le chemin de mon foyer. Tu pourras constater qu'il me reste une sacrée trotte à faire"

Je le regardais calmement. J'avais abaissé ma garde, sans pour autant l'avoir négligée, afin de diminuer la tension entre nous deux. Je ne doutais que peu de ma victoire en cas d'affrontement frontal, mais je ne savais pas si j'en sortirai indemne ou encore si l'elfe allait frapper de front. Il vaut mieux désamorcer un conflit plutôt que le provoquer comme disait mon grand-père. Sauf si ça concerne une femme ou de la bière. Je pense pas qu'il ne veuille de bière.

"Bon c'est pas tout ça mais j'ai d'la route à faire. Et faut que j'me mette en marche sinon j'aurais jamais assez de provisions pour tenir. Dis moi. Le village le plus proche, il est bien à l'Est non? Enfin, le plus proche en direction d'Angaïla?"

Cela n'étonna Amrod qu'à moitié lorsque le nain lui annonça qu'il voyageait. Vu la façon dont il était chargé, cela ne faisait aucun doute. Mais en effet, il avait encore de la route devant lui avant d'atteindre Angaïla. L'elfe aussi, vagabondait beaucoup. C'était presque toute l'histoire de sa vie, à vrai dire. Du moins, c'était comme ça qu'il voyait les choses désormais. Et lui aussi était sur le chemin de sa contrée natale. Celle-ci lui manquait vraiment, et ce même s'il aimait parcourir les autres régions. Cela faisait trop longtemps qu'il était parti, et il avait hâte de retrouver les vastes forêts d'Evanya.

"Je vois", répondit Amrod. "Je pense être là pour les mêmes raison que toi, alors. Ça fait bien longtemps que j'ai quitté Evanya -un peu trop longtemps peut-être. Je suis sur le chemin qui me ramènera... chez moi."

C'était étrange, mais il n'arrivait pas vraiment à considérer un lieu précis comme chez lui. Evanya était sa terre natale, et comme tous les elfes, il aimait ces vastes forêts qui l'avaient vu naître et grandir. Mais les souvenirs que ces lieux faisaient ressurgir en lui l'empêchaient de se sentir complètement à l'aise. Cela peut paraître troublant de ne pas avoir de chez soi, de lieu auquel se rattacher, de ne pas pouvoir se dire que si jamais tout va mal, on pourrait toujours rentrer chez soi. Ce n'était pas le cas pour Amrod. Il s'était depuis longtemps accoutumé à cette condition. Il n'était chez lui ni en Evanya, ni en Oryenna, ni nulle part ailleurs. Sa demeure était la route, voilà tout.

"A l'Est et pas très loin d'ici", répondit l'elfe en hochant la tête. "Dépêche tes petites jambes si tu veux y être avant la nuit."

Merci, je vais de ce pas me mettre en route. Dommage que je n'ai pas le loisir de laisser à mes petites jambes les joies de botter l'arrière-train d'un Elfe. Mais bon, la vie est ainsi faîte. Si on se recroise un jour, peut-être pourrons-nous faire plus ample connaissance, ou alors nous battre une fois pour toutes. Chez nous, on règle certains conflit par un concours de boisson et je dois dire que je n'ai encore jamais affronté d'Elfe. Oh et une dernière chose: un foyer, ce n'est pas forcément là où tu vis, mais ce pour quoi tu te bats. Garde ça en mémoire gamin. prononçai-je avec le sourire aux lèvres.

Je rangeais mes haches, réajustais mon paquetage sur mon dos, vérifiais que mon arbalète était toujours accrochée à mon sac et repris la route vers l'Est. Cette rencontre avec l'elfe m'avait amusé. je ne lui avait même pas demandé son nom. Bah, après tout, je m'en moque.
Ça n'a pas trois poils au menton et ça cherche à épater la gallerie. Non mais j'vous jure, les jeunes de nos jours n'ont plus aucun respect pour leurs aînés.

J'arrivais dans un village à la tombée du crépuscule. La route avait été harassante et mes pieds commençait a s'engourdir. Je me dirigeais vers la taverne la plus proche pour refaire le plein de provisions avant la reprise de mon trajet

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