Kâligor Malëter, fin de journée, 1er cycle de Kreskìntia, Ignïa An 245 Il faisait bon. L'air tiède de cette fin de journée s'engouffrait dans ma fourrure. La forêt semblait de plus en plus silencieuse. Je sentais déjà les effluves du lac Miriel me parvenir. Je courrais, avec deux de mes compères, côte à côte. L'un d'eux tourna la tête vers moi et me fit un signe. Il sentait aussi. Nous nous arrêtâmes, juste derrière un vieil arbre couché. Je sentais son écorce morte, et les débris crissaient sous mes pattes. Puis je me transformais. Mes alliés firent de même. Je passais la main dans le tronc, par un trou soigneusement dissimulé avec des feuilles. Tout était là. Je posais le sac de toile de jute par terre, m'accroupis, puis l'ouvris. A l’intérieur il y avait des habits, et trois couteaux. Je me servais dans le sac, prenant une arme et mes vêtement et m'habilla. La nudité ne nous gênait absolument pas, nous étions tous habitués. Une fois tout le monde prêt, je terminais les derniers ajustement de ma cape marron, et brisa enfin le silence qui s'était installé depuis notre départ:
-"Voilà où elle habite. Faites attention. Elle est sûrement armée, maligne et redoutable. J'ai entendue dire qu'en plus d'être une excellente voleuse, et qu'elle se reconvertit petit à petit dans l'assassinat, elle fait partie des Rhaws. Ne la sous-estimez pas. Nous avons un plan et tenez-vous y."Mon ton ne tolérait aucune erreur. D'ailleurs ils hochèrent la tête s'en rien dire et se postèrent à l'orée de la forêt. Je les aimais bien ces deux-là. Efficaces, peu bavards, et pas du genre à improviser. C'était ce qu'il me fallait. Je m'accroupis et attendis qu'elle sorte.
Quelques heures plus tard, le soleil avait presque disparu derrière les arbres, de l'autre côté du lac. Cela créait une ambiance paisible, calme et agréable. Sa maison n'était pas très grande, et tout en bois. Il y avait des fleurs le longs des murs, et même certaines y grimpaient. Un peu en retrait, sur la gauche et certainement du côté arrière de la maison, il y avait un petit carré de terre retournée avec des piquets plantés dedans. Cela devait être là qu'elle cultivait ses remèdes et grâce à ça qu'elle préparait ses fioles. Sur la droite, encore derrière, se tenait l'enclos de son cheval. Il broutait paisiblement, sans se douter de rien.
Je m'étais bien renseigné sur son compte. Elle avait combattu avec l'Alliance, lors de la bataille de la Muraille de Melehtë en Evanya, contre les Lycans, qu'elle détestait d'ailleurs. Elle avait assassiné plusieurs humains, ainsi que deux vampires, et s'était introduite dans une demeure vampirique pour commettre un autre meurtre. Mais il y avait eu ce raid d'elfe anti-vampire, contre qui elle a dû s'allier aux autres invités du bal, pour pouvoir survivre, et combattre ces elfes. Elle était du genre à se mettre en danger, dans toutes sortes de plans périlleux voire suicidaire, mais qui réussissait quasiment à tout les coups. Elle n'avait pas peur de la mort, et savait être très discrète. Peu savait qu'elle avait deux identités. Et bien sûr, elle était chez les Rhaws, et apparemment avait de grand projet pour eux. Oui, j'en savais beaucoup sur elle. De toute manière, en Ephaëlya, quand on cherche bien on se débrouille toujours pour savoir. Tout était question d'argent et de persuasion.
C'est à ce moment ci qu'elle sortit. Et elle n'était pas habillée en civil, mais avait sa tenue de nuit, celle d'assassin. Cela allait peut être compliquer les choses, mais pas si on s'y prenait bien, comme prévu. Nous étions environ à 150 mètres de son habitat. Je fis signe à mes acolytes de commencer à s'approcher, sans faire de bruit, pas à pas. Elle était de dos. Elle trafiquait sa serrure, sûrement qu'elle fermait pour la nuit. Elle mit sa cape sur les épaules, et partit en direction de l'enclos. C'était maintenant ou jamais.
Nous étions maintenant à dix mètres. Elle ne s'était aperçu de rien. La fraîche brise qui s'était levée était en face de nous, et donc portait notre odeur au loin, dans notre dos. C'était parfait. Nous nous déployons dans son dos, en arc de cercle. Elle s'approchait de la clôture. Son cheval vint à sa rencontre. Nous avançâmes d'un pas. Il nous vit et releva la tête en hennissant. Elle luit parlait, lui demandant ce qui n'allait pas. Il piaffa. Elle se retourna. Mais c'était trop tard. Mes deux souffrifres lui sauta dessus, et après qu'elle s'était débattue un cours instant par de vigoureux coups de poings, pieds, genoux et autres, ils parvinrent à l'immobiliser. De suite après, je lui mis le sac sur la tête, et l’assomma d'un bon coup bien sentie derrière la nuque.
-"Comme sa tu feras dodo pendant tooous le trajet et tu nous embêteras pas. C'est bien."Le cheval était vraiment en colère et continuais d'hennir et de donner des coups de sabots dans le vide. Nous décidâmes de l'ignorer soigneusement. Mes compères ricanèrent, et à trois, nous la soulevons pour la portée jusqu'au bois. De là, nous fîmes une pause. L'un d'eux fit une remarque:
-"C'est débile d'avoir laisser les chevaux dans la forêt, à une heure d'ci, on va devoir se la trimbaler pendant une heure, chef.J'esquissais un sourire en coin. C'est le moment que j'attendais pour leur annoncer la partie du plan qu'ils n'allaient pas aimer. J'écartais ma cape, et dévoila deux cordes que j'avais caché jusque là. Je gardais ce même sourire, en leur disant:
-En vous engageant vous avez bien acceptés de faire tous ce que je voulais pour m'aider à la capturer on est bien d'accord.Ils se regardèrent. Le même prit la parole, plus hésitant en voyant les cordes:
-Oui... Et donc... ?-Et bien voici deux cordes. Vous allez vous transformer et la tirer. Nous avancerons plus vite comme sa. Et sans rechigner. Si vous voulez votre part d'or et ne plus exister aux yeux de la loi, vous avez plutôt intérêt à vous taire et à faire ce que je vous demande. Sinon, je m'arrangerais pour vous pourrir votre misérable vie, et celle de votre entourage, si vous en avez. J'espère avoir été très clair."Je tendis la corde entre mes mains. Ils ne dirent plus rien et se transformèrent, en déchirant leurs habits. J'attachais la corde au premier loup, au niveau du poitrail, et fis un nœud. Puis je reliais l'autre bout à l'elfe, qui gisait par terre, toujours inconsciente. Je passais la corde autour d'une de ses épaules et de la taille, pour minimiser les risques qu'elle se démembre. Il me la fallait vivante. Je fis de même avec le deuxième loup et relia avec l'autre épaule, toujours à la taille. Je ne la désarmais pas, car elle aurait besoin de ses armes. Et puis, vu le coup, elle était inconsciente pour un bon moment. Je les prévenais, juste avant de me transformer:
-"Je passe devant. Je vous protège d'éventuelles attaques animales ou autres."Je pris donc la tête du convoi, et partis silencieusement dans la forêt, maintenant complètement noire. Une chouette hulula et prit son envol. On entendait à peine nos pas, sous le couvert de feuilles légèrement humides qui tapissaient le sol. Nos respirations formaient un petit nuage à chaque fois, bien qu'il ne fasse pas encore trop froid. Je veillais à ce que notre protégée ne se fasse pas mal et reste bien inconsciente. Je nous frayais aussi un chemin à travers les fourrés et les arbres.
Bientôt, cela fit une heure que nous marchons. Je sentis les chevaux. Un petit moment après, je leur fis signe de s'arrêter, pour ne pas effrayer les bêtes. Les deux loups s'assirent. Ils commençaient à être essouffler à force de tirer notre amie. Je me transformais, puis en restant nu, je leur enlevais les cordes. Ils se transformèrent à leur tour et soupirèrent. Mais ils ne protestèrent pas. Ils savaient de quoi j'étais capable. Je m'approchais des chevaux, qui était attaché à deux pas de nous, et leur lancèrent les vêtements accrochés à la selle. Même si restait nu ne nous dérange pas, il faisait quand même assez froid maintenant. Nous n'étions pas en été. Et oui, tout était prévu depuis le début.
J'accrochais les cordes à ma selle, et puis leur demanda:
-"Venez, on va la mettre sur ma selle."Nous nous approchâmes d'elle. Sauf qu'elle commençait à remuer et à porter sa main sur sa tête. D'un autre coup, je la fis revenir au doux pays des rêves.
-"Désolé ma jolie, t'es pas encore arrivée."Sur ce, aidé de mes compagnons, je la mis à l'avant de ma selle, et monta juste derrière. Les deux autres firent de même. Je leur indiquais:
-"Personne ne va s'inquiéter de sa disparition, c'est une inconnue, elle se fond dans la masse. Cependant, trois lycans sur des chevaux portant un corps d'elfe, à travers la ville ce n'est pas idéal. On reste à couvert le plus possible, et on évite les grands chemins. C'est parti."Je talonnais Jarràl, ma monture, et nous partîmes au trot. Nous prenons la direction de Thaodia, plus précisément du Refuge de la Griffe Noire. Dans environ quatre jour de cheval, on devrait y être, pour la pleine lune, pile le jour des Lycans, un Terrïa. L'elfe allait sûrement se réveiller avant d'avoir atteins notre destination. Dans ce cas je savais exactement ce que j'allais faire. Pour l'instant, tout se déroulait suivant le plan. Les habits planqués, sa sortie, les cordes... Avec un sourire cruel, j'entamais ce long voyage. Je tenais ma revanche, Enfin !