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 [Quête 5] Mensonge pieux

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Eramos d'Irifuse
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MessageSujet: [Quête 5] Mensonge pieux   [Quête 5] Mensonge pieux EmptyMar 22 Oct 2013 - 22:04

Ventusiar avait agrippé de sa poigne glaciale l'Oryenna et avec elle un manteau de neige épais s'était installé en tapissant la région. La veille avait été clémente, mais la cruelle saison froide rappelait aujourd'hui à l'ordre tous ceux ayant eu l'espoir d'une saison plus douce qu'à l'habitude. Au début, le calme plat de l'horizon enneigé s'était entrainée en légère bourrasque pour ensuite décupler de puissance rendant impossible le moindre déplacement aérien ou même terrestre.

C'est dans une grotte qu'Eramos avait passée la nuit. Au premier signe de la tempête, il avait renvoyé Torpeur vers la cité où il pourrait rester à l'abri, les endroit assez grand pour cacher un griffon étant plus rares que celles pouvant abriter un seul humain. Le vieil homme avait cru terminer ses jours dans cette minuscule cachette le coupant du vent; le froid se faisant de plus en plus mordant. Mais, il avait pu l'endurer grâce à un flacon de graisse animale qu'il avait étendu sur la neige pour ensuite y mettre le feu. Les flammes avaient durées une bonne partie de la nuit, assez même pour qu'il puisse dormir quelques heures.

À son réveil, la neige était arrivée à lui, lui recouvrant les jambes jusqu'aux cuisses. La sensation fut désagréable, mais il s'en remit rapidement. La tempête avait cessée.

Le vieil homme mit le nez dehors et fut surprit par les dégâts du blizzard qu'il avaient manifestement sous-estimés. Le verglas avait aussi frappé, recouvrant chaque tronc et branches d'arbres d'une importante couche de glace, comme si tout avait été figée dans le temps, immuable.

Secouant son manteau gris, il inspecta les horizons et ne reçu que le silence en retour. À en croire la vertigineuse chute du soleil, il devait être tard; dans les neufs heures et la plupart des habitants de la Clairière devaient déjà être au lit. Agilement, il monta sur l'amoncellement de roc lui ayant servi d'abris et tenta de se repérer. Au-travers les arbres il remarqua alors une mince colonne de fumée, mais pas assez mince pour être un campement, il s'agissait certainement d'un village ou peut-être d'une tribu; la Clairière appartenant officieusement aux Centaures, mais Eramos rejeta cette idée, s'ils voulaient se montrer, ils le faisaient. Autrement, personne ne pouvait les trouver à moins d'être l'un d'eux ou d'avoir beaucoup de chance...

Plutôt de la malchance, pensa-t-il.

Prenant son sac de voyage et l'attachant en bandoulière, il se mit à marcher dans la neige profonde recouverte d'une fine couche de glace, rendant tout mouvement discret impossible, la glace cédant aléatoirement accompagnée d'une bruit de craquement sourd. Le voyageur rangea donc une dague de lancé dans sa manche et en l'attachant sans trop la serrer sous son manteau. Elle ne tomberait pas, mais d'un mouvement brusque, il pourrait l'extirper.

Une heure passa et il fit son entrée dans le village. C'était un petit groupe d'humains vivant en marge de la société, chassant et cultivant pour survivre. Du moins, durant les saisons le permettant. Quand la saison froide arrivait, ils espéraient avoir assez stocké et se débrouillaient pour chasser. Eramos connaissait cet endroit, il se nommait Bâtonfeuille, en l'honneur de son fondateur. Bien qu'il ait beaucoup lu sur sa population ayant décidée de vivre à l'ancienne, il ne l'avaient jamais rencontrée.

Le grand homme décida alors de se montrer des plus poli et aimable car il avait besoin d'un endroit où se reposer et manger en plus que les étrangers étaient en habitude mal vues dans des endroits reculés comme celui-ci. Il ne s'était pas trompé, personne ne semblait à l'aise de le voir. Pire, ils semblaient suspicieux, voir en colère pour certains. Il ne perdit donc plus de temps et se dirigea vers la seule taverne du village: La taverne de Bâtonfeuille.


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MessageSujet: Re: [Quête 5] Mensonge pieux   [Quête 5] Mensonge pieux EmptyMer 6 Nov 2013 - 16:22



Mensonge pieux...

Le dernier souffle du monde, voilà le nom que portait aussi Ventusiar. Le huitième mois d’une nouvelle année venait de faire son apparition, apportant avec lui les vents glacials du Nord et les premières tempêtes de neige. Le temps avait été clément durant le début de la Période du Grand Froid. Si les averses torrentielles et les orages avaient été présents, ils n’avaient pourtant pas passé tout le mois d’Imberiar à martyriser les voyageurs et les vagabonds. Certains s’étaient donc attendus à un grand froid doux mais les températures mordantes et les chutes de neige violentes venaient de leur faire comprendre qu’ils avaient tout simplement eu tort d’avoir tant d’espoir.

Si le froid avait été un problème pour les vampires, Abygaël aurait certainement frémit, un frisson parcourant sa colonne vertébrale. Pourtant, son corps au sang-froid lui permettait de ne rien ressentir même si elle se plaisait à s’emmitoufler sous une couette ou dans un manteau de fourrure. La femme fragile qu’elle pouvait avoir l’air d’être était pourtant bien là, sous sa carapace. Cependant, ce n’était pas de rester vampire au foyer qui faisait vibrer la belle. Depuis qu’Aby avait rencontré Ciëlanys, elle ne quittait plus la capitale vampirique, passant son temps avec l’ancien elfe et allant siroter du sang dans les tavernes en sa compagnie. Les moments passés avec son amant étaient merveilleux, mais elle commençait à se lasser, n’ayant jamais vu sa vie sans voyage et sans aventure. Aussi, après une dernière journée aux côtés de son vampire, la mercenaire avait repris la route qu’elle suivait depuis maintenant plusieurs cycles, sans réellement savoir ce qui se trouverait au bout de ce chemin.

Un épais manteau de neige recouvrait les terres d’Ephaëlya, plongeant le monde dans une douceur fraîche et dans un silence apaisant. Les rayons de la lune faisaient scintiller les flocons qui parsemaient le sol en masse, leur donnant une allure de diamant ou autre pierre précieuse que les nains se seraient empressés de miner. Les paysages étaient maintenant entièrement blancs, les lacs étant recouverts d’une épaisse couche de glace et les troncs des arbres prisonniers du verglas. En quelques jours, la météo avait changé du tout au tout. Abygaël sourit lorsqu’elle sortit de la cité d’Ambroisie et que son regard se posa sur l’horizon. La belle aimait les merveilles que pouvaient offrir la nature, elle aimait le charme envoûtant et presque hypnotisant que dégageaient les décors du Grand Froid. Ils lui rappelaient les membres de sa race : glacials, beaux et dangereux. Après un dernier regard sur la capitale, la jeune femme s’élança dans la neige.

Cela faisait longtemps que la vampire n’avait pas mis les pieds sur le territoire des humains et pourtant, elle avait aimé y passer du temps, charmant les hommes et tuant ceux qui l’avaient mérités à ses yeux. Après tout, la belle n’aimait pas forcément la mort mais lorsqu’elle laissait place à sa sauvagerie, c’était la plupart du temps pour la bonne cause. Réflexion faite, elle irait bien rendre visite à ce peuple presque aussi vicieux que celui des buveurs de sang. Vêtue de son corset de cuir et du pantalon de la même matière, les seuls habits qui paraissaient de saison étaient ses bottes et la cape en peau qui recouvrait ses épaules. Son katana trônait dans son dos, attendant certainement le sang qu’il faudrait verser.

Marchant toute la nuit, Aby se savait maintenant en territoire humain mais elle connaissait aussi le chemin que la lune menait dans le ciel : le jour ne tarderait pas à se lever, il lui faudrait vite trouver un endroit pour passer la journée et se reposer. La belle observa les horizons, humant légèrement l’air pour déceler une quelconque présence. Personne. Cependant, une odeur de feu de cheminée s’élevait au loin, annonçant certainement la présence d’un petit village. Cela serait parfait pour rester discrète et repartir une fois le soir tombé. Bondissant de son point d’observation, la jeune femme s’élança vers le lieu d’habitations et y pénétra sans grand soucis. Les rues étaient désertes et la présence de vie semblait inexistante. Les habitants de ce petit village devaient pour le moment, avoir sombrés dans un sommeil lourd et ne se réveilleraient que d’ici quelques heures.

Heureusement pour Abygaël, le propriétaire de la taverne du village était déjà debout, en train de frotter son comptoir avec un chiffon. La capuche sur la tête, la vampire entra dans le vieux bar, rabaissant celle-ci sur ses épaules et souriant à l’homme. Il lui lança un regard suspicieux mais lui donna les clefs de la chambre qu’elle venait de demander, les lui jetant presque à la figure. Un rictus se dessina sur les lèvres de la belle, dévoilant ses canines dans un sourire faux. Le tavernier changea de suite d’attitude, la crainte pouvant se lire sur son visage. Il s’inclina doucement avant de disparaître dans ce qu’Aby identifia comme les cuisines. Elle posa quelques pièces sur le comptoir, un acompte avant de donner la somme finale pour la chambre. Rapidement, la voyageuse monta les marches de l’escalier, ouvrit la chambrette qui lui était destinée et s’affala sur le lit, plongeant à son tour dans un sommeil reposant…

Lorsque la nuit se leva de nouveau, Abygaël était déjà réveillée et avait pris sa toilette, prête à rejoindre le comptoir avant de partir de ce village où les habitants ne semblaient pas si accueillants. Refermant la porte de la chambre, elle descendit les marches montées la veille et déboula dans la salle principale de la taverne. La belle sentit tous les regards se poser sur elle. Les hommes du village semblaient s’être donnés rendez-vous ici pour voir « la vampire qui est en ville ». Aby haussa un sourcil devant tous ces visages méprisants et se dirigea vers le bar sans un mot, s’appuyant dessus et demandant un verre d’eau, plus pour faire bonne figure qu’autre chose. Fixant le bois qui se trouvait sous ses coudes, la vampire tendit l’oreille, écoutant les discussions et murmures qui la concernaient. Plusieurs minutes passèrent avant que la jeune femme aux cheveux châtains presque roux comprenne tout. Il y avait eu des disparitions dans le village et ces hommes semblaient persuadés que la « suceuse de sang » était coupable de ce crime.

D’ailleurs, Aby sentait la pression qui montait doucement dans la pièce, l’atmosphère se faisant de plus en plus lourd. Elle attendait qu’une des brutes lancent l’assaut en se jetant sur elle. Pourtant, la porte s’ouvrit dans un grincement, une brise glaciale pénétrant dans l’auberge ainsi qu’un inconnu. La belle tourna légèrement la tête pour apercevoir la personne qui venait d’entrer mais vu les regards suspicieux des villageois, lui aussi était un inconnu. Cet étranger venait peut-être de sauver la vie de la dernière représentante des De Szentes. Elle attendit donc patiemment, espérant que le nouvel arrivant la rejoigne au comptoir pour commander un verre ou une chambre…

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Eramos d'Irifuse
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MessageSujet: Re: [Quête 5] Mensonge pieux   [Quête 5] Mensonge pieux EmptyJeu 14 Nov 2013 - 22:03

C’est suspicion et appréhension qui accueillirent le vieil homme dans l’unique auberge de Bâtonfeuille, mais heureusement pour Eramos -nullement gêné par cet attroupement d’yeux le toisant- ce n’était pas la première fois qu’il avait affaire au même genre de scène. En ville, les gens étaient moins portés à regarder par-dessus leur épaule pour voir qui entrait à chaque fois, mais dans certains quartiers malfamés c’était rituel et personne ne s’y dérobait.

Cependant, en cet endroit reculé, il y avait quelque chose différent dans le regard des villageois, un sentiment tout autre que ceux engendré par la xénophobie; c’était la peur, mais pas une peur passive. C’était une terreur profonde et encrée en chacun des buveurs qui n’avait tôt de se transformer en haine. La haine qui transforme les plus pieux des hommes en plus vils démons.

Eramos aurait tôt fait de se détourner de cet endroit avant sa fusion avec son homonyme, mais aujourd’hui Cœur d’aigle n’avait plus aucune peur sachant son destin tout tracé et incontournable. Il marcha donc droit devant lui, rejoignant le comptoir sans rencontrer aucun regard ardent, ni fusillade d’yeux, ce qui -pour certain villageois- les emplirent de doutes, mais pour d’autres leur fit l’effet d’un feu auquel on jetait de l’huile. Leur colère se répandant soudainement à-travers la pièce comme un feu de forêt.

Maintenant assis, le vieil homme devinait les intentions des hommes et femmes le toisant, le croyant en position vulnérable. De plus, le tavernier ne daignait bouger d’un iota, blême. C’était peut-être lui le plus dangereux en ce moment. L’ancien chasseur de prime croisa son regard, ses yeux émeraude tranchant les siens avec non de la défiance, mais une analyse froide et calculatrice. Le tenancier avait du le sentir car il se décida à quitter promptement par la porte arrière. Abaissant la tête, penseur, Eramos cachant ses traits faciaux par l’ombre de sa capuche.

- Vampire, affirma-t-il à l’intention de sa voisine de siège.

Le mentor de la guilde attrapa un verre de gnôle et en remplit le contenu d’un alcool ambré provenant d’une bouteille à sa portée pour ensuite le porter à ses lèvres et y boire brièvement.

- Voilà qui explique quelque peu l’atmosphère qui règne ici. (Il but une autre gorgée.) Vous êtes en danger.

Cela n’avait pas prit longtemps à Eramos pour détecter l’anomalie de la scène –la vampire- trônant au centre du comptoir. Il avait traqué, tué et sauvé bon nombre de créatures nocturnes, assez pour en reconnaître l’odeur, le comportement particulier et les physionomies naturels des représentants de cette race.  

- Il vous reste deux choix. L’un est que vous vous débrouilliez seule pour la suite des évènements, mais cela voudra signifier votre mort à coup sur et peut-être la mienne, ou la leur. Le deuxième est que nous nous rendions.

L’homme sombre se resservit un verre, réchauffant ses os tout en lui fouettant le sang. Quel soulagement !

- Ces gens sont sur le point d’essayer de nous mettre la main au collet et je ne sais pas pourquoi. La seule chose que je sache est qu’ils ne nous tueront pas s’ils ne se sentent pas menacé. Ne me demandez pas pourquoi, je le sais c’est tout.

Derrière eux, un homme de grande taille se levait et craquait ses jointures tout en s’échauffant les muscles. Ce dur-à-cuire serait bientôt rejoint par ses compagnons qui verrait en son courage une opportunité. Eramos l’avait remarqué, mais cela ne sembla pas le perturber. C’était maintenant dans le regard de la belle vampire qu’il plongea le sien, une voix calme posant cette ultime question, celle qui dépendrait de leur destin à tous deux.

- Que choisissez-vous ?
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MessageSujet: Re: [Quête 5] Mensonge pieux   [Quête 5] Mensonge pieux EmptyDim 15 Déc 2013 - 0:07



L’odeur d’alcool et les fumets de transpiration humaine semblaient imprégner l’atmosphère présente dans la taverne de ce petit village reculé et oublié de la plupart des peuples ephaëlyens. Aucun étranger ne devait avoir mis les pieds ici depuis un bon nombre de jours vu l’accueil chaleureux qui avait été réservé à la belle vampire. Pas étonnant d’ailleurs vu les regards méchants et les moues cruelles qui s’étaient dessinées sur les visages des hommes présents dans l’auberge, rien de tout cela ne pouvait donner envie de venir leur rendre visite. Qui était assez fou pour venir se fourrer dans un coin aussi perdu que celui-ci, surtout si c’était pour s’y faire lyncher et entendre ses oreilles siffler sous les propos qui devaient être tenus dans le dos des différents inconnus qui osaient venir leur dire bonjour.

Abygaël pouvait donc être classée dans la liste de personnes peu fournies d’après elle des êtres, toutes races confondues, qui étaient parvenus jusqu’au village et qui y avait passé une nuit. Ou plutôt une journée pour elle. Ces personnes semblaient n’avoir vu aucun signe de présence du monde extérieur depuis des années et voilà que la vampire ne semblait pas être la seule à s’être aventuré dans leur bourgade. Un homme d’un certain âge venait de pénétrer dans la bâtisse qui semblait être le lieu de rendez-vous des barbares de ce coin paumé. D’un certain âge… Aby n’aurait su dire quel âge avait celui-ci, elle n’avait pas croisé énormément d’humain et sa race ne vieillissait pas alors elle ne savait pas réellement quand elle pourrait qualifier une personne de jeune ou de vieux. Elle, elle était jeune et garderait ses traits de poupée de porcelaine durant les siècles qui suivraient… Enfin, si elle survivait aux regards noirs et assassins que l’on lui lançait.

Reposant son regard sur son verre d’eau, ne prenant pas la peine de détailler le nouvel arrivant, la guerrière fit glisser son doigt sur le bord du petit récipient de verre comme si elle espérait le faire chanter comme lorsque l’on caressait le cristal du bout de ses doigts humides. Les effluves des hommes présents puaient la haine mais c’était bien plus compliqué que cela. Derrière cette colère, un parfum plus prononcé semblait être la source de la colère qui régnait dans le cœur de ses humains : la peur. La jeune femme était-elle si effrayante ? Non. Quand elle était arrivée dans le village, déjà son instinct lui avait murmuré que quelque chose ne tournait pas rond par ici. Elle était certainement une des raisons de plus pour les villageois de s’inquiéter, elle qui, pour une fois, était venue en paix.

Il n’y eut qu’un mouvement, qu’un seul, celui de l’homme qui était tout aussi étranger qu’elle. Il s’était avancé, traversant la pièce sans se presser mais d’une démarche confiante comme l’avait deviné la belle au bruit de ses pas. Un tabouret près d’elle fut tiré et l’homme âgé s’assit sans un mot. Le tavernier, toujours posté derrière son comptoir comme s’il s’en servait pour barricade, accueillit son nouveau client comme il le fit avec la précédente, sans bonjour, sans sourire, sans rien. D’ailleurs, sans qu’Abygaël sache pourquoi, il finit par quitter son poste de surveillance, détalant par la porte arrière de l’auberge. La rousse fixait toujours son verre, attendant que son nouveau compagnon de buvette brise ce silence pesant. Il ne dit qu’un mot, un seul qui signifiait tout. Il savait ce qu’elle était, qui elle était : une vampire. Un mince sourire en coin se dessina sur le visage de la demoiselle qui détourna légèrement la tête vers celui qui lui avait parlé, le regard se servir une boisson qui sentait l’alcool à plein nez. Très peu pour elle. Ses longs cheveux qui cachaient son visage caressaient légèrement le bois du bar alors que l’humain bu une gorgée, reprenant la parole.

" Voilà qui explique quelque peu l’atmosphère qui règne ici. Vous êtes en danger. Il vous reste deux choix. L’un est que vous vous débrouilliez seule pour la suite des évènements, mais cela voudra signifier votre mort à coup sur et peut-être la mienne, ou la leur. Le deuxième est que nous nous rendions. "

Très perspicace. Elle était en danger et lui venait se mettre dans les mêmes problèmes qui allaient probablement la noyer jusqu’au cou. Aby soupira, ronchonnant intérieurement comme l’aurait fait une gamine de quelques années pour montrer qu’elle n’était pas d’accord de la sentence qui lui était réservée. Pour une fois qu’elle n’avait tué personne ou même ne s’était nourri de personne, voilà qu’on la prenait quand même pour cible. L’homme à l’âge certain exposé les deux plans qui lui venaient à l’esprit. Très aimable de sa part, lui qui ne connaissait rien d’elle et pourtant essayait de lui sauver la vie. Il but encore une gorgée de son remontant avant de finir ses propos.

" Ces gens sont sur le point d’essayer de nous mettre la main au collet et je ne sais pas pourquoi. La seule chose que je sache est qu’ils ne nous tueront pas s’ils ne se sentent pas menacé. Ne me demandez pas pourquoi, je le sais c’est tout… Que choisissez-vous ? "

Abygaël venait de relever son visage, dégageant de celui-ci les cheveux qui le masquait comme pour préserver son identité. Un sourire éblouissant venait de se dessiner sur son visage, dévoilant ses crocs comme si elle était affamée. Elle savait ce que ces hommes cherchaient mais elle n’était pas le souci qu’ils espéraient tant anéantir. L’humain n’avait pas tort. A deux, ils tiendraient peut-être longtemps face à ces brutes mais ils n’étaient pas du tout certains de sortir et seule, elle n’aurait le temps d’en tuer que quelques-uns avant d’y laisser sa peau à son tour. Pourquoi fallait-il toujours qu’elle se mette dans des problèmes comme celui-ci ? Lors de ses missions d’assassinats ou de ses quêtes, tout se passait toujours merveilleusement bien. Elle charmait, flirtait, buvait, tuait et empochait l’argent sans qu’il n’y est de contretemps et quand elle vivait sa vie « normale », il fallait toujours qu’il y ait quelque chose de travers.

Détournant son visage vers son nouveau compagnon de route à priori, la dernière des De Szentes croisa le regard de l’étranger. Une sérénité impressionnante brillait dans les yeux émeraude de l’humain, n’attendant plus que la réponse de la vampire. Si elle lui disait non, que ferait-il ? Se battrait-il à ses côtés ou fuirait-il comme une lâche ? Si Aby ne le connaissait pas, elle savait pourtant qu’il n’agirait pas comme sa dernière pensée le lui avait dicté. C’était ce genre de chose que l’on pouvait lire dans un regard, le courage, la détermination. Un bruit de craquement fit revenir la belle vampire sur terre, laissant sa réflexion dans un coin de son esprit. Un colosse venait de se lever, bougeant ses phalanges pour leur faire faire du bruit, s’étirant pour se lancer dans la bataille. Bientôt, les villageois se jetteraient sur le monstre qu’elle devait être à leurs yeux.

" J’aimerai éviter de finir mes nuits ici, je reste persuadée qu’un autre endroit m’attend… Et moi, je sais pourquoi ils m’en veulent, même si je n’y suis pour rien, croyez-moi. "

Sa voix s’était faite douce et aussi basse qu’un murmure, s’adressant seulement à l’homme qui se trouvait à ses côtés. Son sourire n’avait pas quitté ses doux traits de porcelaine, ses yeux dorés fixant ceux qui avaient la couleur de la nature au soleil, d’après les livres qu’elle avait lu. Poussant son verre d’eau du bout de ses doigts un peu plus loin sur le comptoir, la belle pivota sur son tabouret, ses canines se dévoilant aux regards des habitants du village, ce qui n’était certainement pas le meilleur moyen de paraître sincère, mais elle n’avait pas réellement le choix.

" Messieurs… Tout le monde va rester calme, je… nous nous rendons. Je ne suis pas celle qui vous a causé du tort et mon ami ici présent non plus. Si vous nous expliquiez plutôt ce qui se passe ? "

Le mastodonte afficha un rictus sadique s’avançant de quelques pas vers les deux étrangers. La belle ne bougeait pas, son regard plongé dans le sien, prête à bondir sur le côté et à dégainer ses lames pour trancher quelques têtes. Il fallait prévoir toutes les options qui pouvaient en découdre de cette petite conversation. La voix du grand gars résonna dans un silence pesant.

" Des enfants sont enlevés depuis plusieurs jours. Quoi de mieux pour rassasier ta soif, monstre, que de jeunes gamins qui ne pouvaient pas lutter contre ton charme hypnotisant et dangereux, tes crocs acérés et ta force surhumaine ? "

Abygaël afficha une grimace. Décidemment, ils n’étaient pas prêts à la croire innocente…

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