La guerre. Ce mot ,salit par le sang de milliers de soldats et de civils, était le symbole même de l'esprit maladif de l'Homme. L’Homme, comprenant la multitude des races qui peuplaient les terres d'Ephaelya. Ce simple mot engendrait des émotions si contradictoires par nature : à la fois excitant et faisait naître tant de peurs dans le cœur de ceux-ci. La fierté de ces Hommes ce gonflait à la vue de cette mission, ayant pour but de protéger leur famille et leurs terres. Mais un frisson parcourait l'échine de leur dos lorsque les pensées d'un avenir jonchait de mort traversaient leur esprit. La guerre n'était que le miroir même de la vie humaine: une folie qui engendrerait autant de mal que de bien, mais indispensable pour se souvenir des valeurs qui ont fait naître notre moral.


Tout comme eux, Viktor se retrouvait coincé dans ce tumulte de pensées. Lui qui n'avait point eut de famille jusqu'à alors, il se voyait désormais inquiet pour la vie de ses frères et de son père. Le renégat était conscient que sa dague ne lui ferait point défaut, extension même de la rage qui bouillonnait secrètement en lui. Se battre, ôtait la vie de ceux qui ont menacé celle de vos proches, souffrir au plus près de la mort ; toute ces réalités avait été le quotidien du jeune homme pendant tant d'année. La différence ici était que ce combat réunissait tant d'âmes, tant de possible futures victimes, que Viktor ne savait comment réagir dans la tornade de lames qui l'attendait. Pourrait-il protéger sa famille ? Le voleur en doutait, la seule directive étant de faire couler à flot le sang des gobelins. Il ne lui restait plus qu'à prier que la destinée ne se vengerait point avec lui durant la bataille, et qu'il pourrait garder un œil sur ses proches. Un espoir si nouveau pour lui, mais qu'il chérissait tant désormais.


Empaquetant des affaires de premières nécessité, Viktor vérifia qu'il possédait ses cinq lames, trois d'entre-elles invisibles aux yeux du monde, et prit sa cape avant de partir. Le jeune homme ne savait que peu de chose sur le royaume des nains, fief où se déroulerait ce charnier humain. Les seuls éléments qu'il avait à sa disposition était cette simple explication : si les gobelins n'était point arrêtés maintenant, ils déferleraient telle la peste sur les terres lycane. Une prophétie que lui et ses frères ne comptaient point contre-dire, l'enjeu étant si important. Sortant de sa petite chambre, le renégat rejoignit la troupe d'hommes qui attendaient patiemment le départ. La majorité d'entre eux étaient excités rien qu'à la pensée de tous ces corps à tués. Viktor lui restait discret, ne partageant point ce fantasme primaire. Si il aimait l'art du combat, enlevé la vie ne lui était point un plaisir personnel. Le jeune lycan le faisait par nécessité, ce désolant que des âmes puissent partir aussi facilement. Mais nous n'étions point dans un conte pour enfant. La vie réservait bien hélas des faces tristement morbides.


Viktor se posa sur une pierre, détendant ses muscles afin de les préparer à l'effort qui les attendaient. Le lycan n'était présent ici que depuis quelques semaines, et la majorité de ces hommes lui était inconnus. Bien entendu, il n'avait plus aussi peur de s'afficher désormais, ayant fait quelques connaissances et s'adaptant tant bien que mal à ce nouveau corps. Il y avait sûrement dans cette foule Tär Blok, un jeune guérisseur qui avait été le premier à lui parler. Un homme au cœur si touchant que Viktor s'était vite lié d'amitié avec ce dernier. Si il n'était point du genre à montrer son attachement, il comprenait pourquoi Sheiz traînait si souvent avec lui. On ne pouvait être dérangé par Tär, le bonheur suivant son chemin. Sheiz Vulcain était le second de la meute Croc Noir. Pour être honnête, il s'agissait aux yeux de Viktor d'un fou, dont la violence avait de quoi effrayer. Pour autant, le jeune homme le respectait car il faisait preuve d'un dévouement pour son peuple à faire jalouser certains rois. Viktor s'était retrouvé à ses côtés lors d'un combat contre un rôdeur humain. Un souvenir qu'il préféra ne point se rappeler, lui qui avait probablement déçu son supérieur. Qu'importe, on ne refait pas le passé, on construit seulement le présent. Entendant l'appel au départ, Viktor se releva, restant quelque peu en retrait de la troupe. Les jeux étaient fait. Les Croc Noir rentraient en guerre contre les gobelins aujourd'hui même. Que leurs griffes les sauves d'une mort non mérité.

La violence, la haine, les envies carnassières, tout cela faisait partie de Tär, le goût de la chair fraîche encore parcourue par le sang bouillonnant de l'homme ou de la bête. Le coeur, encore battant, arraché à son support et déchiqueté encore palpitant. Laisser son esprit lupin se révolter contre une humanité innocente était loin derrière Tär, tout cela faisait partie du passé... Et pourtant, aujourd'hui, il ferait couler le sang, renonçant à tous ces principes auxquels il a longtemps était acharné. Pour sa famille, pour sa meute, pour son frère, il se battrait, ses crocs s'enfonceraient dans la chair des Peaux vertes jusqu'à ce qu'il n'y en ait plus un seul debout. L'odeur de sang lui picotait déjà les narines, il était fou, le sang chaud remplissant sa bouche devenait pour lui un fantasme primaire qu'il lui fallait à tout prix assouvir. Ce n'était pas sain, surtout pour un guérisseur, mais le lycan avait banni toute morale de son esprit. Il avait faim.


Sheiz l'avait averti d'une guerre imminente entre les nains et les gobelins, ces derniers ayant pour objectif de conquérir Angaïla. Le second de la meute lui avait ainsi exposé sa vision des choses, si les gobelins gagnaient cette affrontement, plus rien ne les empêcherait de déferler sur les terres de Thaodia. Au nom de la meute Croc-Noirs, sont frère avait pris la décision de rallier les armées naines pour ainsi mettre toutes les chances du côté nain de remporter cette guerre. Le guérisseur, peu enclin dans un premier temps, n'avait rien ajouté et s'était retiré pour méditer là dessus. Tär avait eut beau se creuser la tête plusieurs jours durant, il n'avait trouvé aucune alternative : Il fallait se battre ou il mourrait. Acceptant peu à peu cette idée, le lycan s'était préparé à tout ça, concoctant diverses mixtures et onguents qu'il avait empaqueté dans un tissu de façon à l'avoir sur lui même en forme de loup.


La nuit précédant le départ du village, il n'avait pas fermé l'oeil, déchiré entre la soif de sang et la raison qu'il s'était forgé au fil de toutes ces années. Allait-il éviter au maximum les conflits et se focaliser sur les soins ou se battrait-il comme un homme, comme ses frères ? Le futur seulement pourra lui répondre, car tout le temps où la lune fut sorti de son sommeil et haute dans le ciel, il ne put se décider sur le tournant qu'il prendrait dans ce conflit. Lorsque le soleil dessinait ses premiers rayons azurés dans le ciel, Tär entama sa transformation en loup, seule forme dont il se servirait pour se déplacer car son loup était beaucoup plus imposant que la moyenne, plus large, plus fort, plus volumineux et il compensait avec le fait que Tär ne maîtrisait absolument aucun art du combat, c'est encore s'il savait tenir correctement une dague. Son paquetage de soin serré autour de son torse, il rejoignit le reste de la meute. L'excitation était palpable mais son expression était diverse, certains étaient immobiles, comme des statues, imperturbables, d'autres ne contenaient pas leur excitation et ne tenaient pas en place. Quoiqu'il en soit, la majorité des personnes présentes était réunie par une même chose, la même soif de sang liait chaque lycan.


Dans la foule, le guérisseur chercha un repère affectif, Viktor, Sheiz, ou même Gil... Mais si ça se trouve Viktor ne participait même pas à cette guerre, comment le savoir. Tär n'aimait pas être seul, surtout dans ces moments là. L'appel du départ retentit et la colonie se mit en marche. Toujours distrait, le loup cherchait une personne connue du regard et il aperçut une cape qu'il reconnut entre milles : Viktor. Il s'approcha de ce dernier, et sans faire de bruit toucha sa main du bout de sa truffe humide pour signifier sa présence. Il se cala au pas du rôdeur et marcha à ses côtés. Le bruit de leurs pas émettait comme un rythme, le rythme d'une marche vers la mort...