Aurore s’éveilla doucement, tiré de son sommeil profond par une douleur émergeant au niveau de son bas ventre. Passant une main sur son bandage, la jeune femme ne put retenir une légère grimace, décidément la capacité de régénération des vampires n’était pas suffisamment rapide pour elle, même si la blessure devait être refermé, celle-ci restait fragile. Après un léger soupire, la nouvelle née finit par ouvrir un œil afin d’observer le corps qu’elle sentait contre elle, l’enfant était encore endormi et de peur de la sortir trop brusquement de son sommeil, Aurore ne préféra pas bouger d’un millimètre.

Ouvrant le deuxième œil, la nocturne fixa un point sur le plafond avant de se laisser doucement sombrer dans ses pensées. Retenant un bâillement, preuve de son état de fatigue encore important, la créature de la nuit ne pouvait s’empêcher de se poser des questions. Qu’allait-il faire de la petite fille ? Est-ce qu’il y aurait des répercutions vis-à-vis du meurtre « volontaire » des autres vampires ? L’impératrice allait-elle être mise au courant et si c’est le cas, l’auberge aurait-il encore une chance d’appartenir au couple ? Loin de regretter son acte, Aurore prenait cependant conscience des conséquences possibles de son acte.

Une chose restait identique, même avec la volonté la plus forte du monde d’Ephaëlya, la jeune femme était actuellement incapable de maîtriser son démon intérieur.  Provoquant une inquiétude profonde dans son esprit, se demandant jusqu’où son monstre, jusqu’où pouvait aller ses crises de folies. Alors qu’elle s’apprêtait à sombrer dans une de ses angoisses, le petit être au creux de ses bras s’éveilla dans un bonjour à peine audible. S’étirant silencieusement, la môme afficha une mine plus reposé mais enlaidit par des traits d’inquiétudes. Chose plutôt normal au vu des circonstances.  

Après quelques échanges, sur la journée de sommeil et l’état de fatigue des deux femmes, celles-ci finirent par se lever sans bruits. Le plancher craquela à peine sous leurs pieds et c’est sans réellement prendre le temps de bien se réveiller qu’elles descendirent ensemble les marches jusqu’en bas. Un léger sourire sur les lèvres, Aurore chercha du regard Adrän sans succès,  doucement l’inquiétude prit la place de la sérénité de la jeune femme qui se mit presque immédiatement sur ses gardes.

- «  Adrän ? »

La petite voix d’Aurore raisonna sans aller plus loin que la salle, poussant doucement la petite sur le côté elle lui murmura à l’oreille de monter, prétextant un oubli à l’étage et lui demandant de faire un peu de rangement avant le départ pour retrouver son père. Une fois l’enfant à l’étage, Aurore longea sans bruit, tel un animal en chasse les murs de l’auberge, cherchant du regard un indice sur la position de son sang-froid mais rien… Alors que l’angoisse devenait grandissante et que la jeune vampire se crispait au fur à mesure que le silence continuait à s’installer, elle finit par se diriger vers l’extérieur de l’établissement.

C’est là qu’elle remarqua ce qu’elle identifia être un garde, il était dos à elle observant vraisemblablement l’environnement. Il allait falloir faire vite, « sa famille » était très certainement en danger et son amant restait introuvable. Alors qu’elle réfléchissait calmement à une stratégie, une vision, une image la fit tirer des conclusions beaucoup trop actives. Sur le sol était rependue par  mèche plutôt important la crinière de son tendre, aussitôt et sans davantage d’enquête, la nouvelle née imagina le pire, une attaque et une bagarre et le garde nettoyant les traces. En une fraction de seconde elle perdit le contrôle de son propre corps, laissant son démon nourrit par la colère prendre les commandes. Alors que ses lèvres se retroussèrent laissant entendre un sifflement tel un cracha de chat, dévoilant deux aiguillons d’un blanc aussi intense que le manteau neigeux.

Aurore se précipita, avant de sauter sur l’individu qu’elle jugeait ne pas connaitre, l’intensité du saut lui provoqua une douleur importante au niveau de sa blessure, mais cela ne sembla pas l’arrêter. Entrainant dans sa chute et son élan l’individu qui roula avec elle sur le sol légèrement humide, la jeune femme ou plutôt son monstre s’imaginait déjà tuer l’intrus avant de prendre la fuite rapidement avec l’enfant pour chercher son partenaire. Une fois au-dessus de sa futur victime et s’apprêtant à lui assainir le premier coup, la main d’Aurore se stoppa, laissant ses yeux vibrer d’une intensité encore inconnue. Les traits du visage du garde lui étaient familiers, pire elle les connaissait par cœur…. Alors qu’elle se reculait vivement consciente de son erreur et du geste  sans retour en arrière possible qu’elle allait commettre, Aurore laissa échapper d’une voix fébrile :

- «  A…Adrän… Mais… Mais… Qu’est-ce que tu fais là… Comme ça ?! »

Aurore provoqua une respiration rapide, hésitante mais surtout terriblement coupable. Elle venait de franchir une limite qu’elle craignait et sans la reconnaissance in extrémiste …  conséquences auraient pu être dramatique. Entrouvrant les lèvres, la jeune femme ne savait plus quoi dire, s’excuser, fuir, ne rien dire, pleurer, mais rien. La nocturne resta immobile sur le sol, oubliant la douleur qui tiraillé son bas ventre, le regard figé sur ses mains –qui représentaient inconsciemment son être, son démon- qu’elle jugeait coupable de tout ça. Aurore aurait voulu fondre en larme, extériorisé cette avalanche de regret et de crainte mais rien ne se passa, comme-ci la vampire rentrait dans un état de choc. Alors qu’elle relevait doucement ses prunelles remplient de remords vers son partenaire, une voix fluette se fit entendre :

- «  Tout vas bien ?.... J’ai terminé de ranger en haut. Je suis prête. »

Fermant doucement les yeux afin d’exprimer, Aurore soupira pensant fortement que plus rien n’allait depuis sa transformation, avant de reprendre un visage particulièrement neutre qui ne lui ressemblait pas. Alors qu’habituellement, un flux de ses émotions étaient toujours perceptibles dans l’air, cette fois-ci rien n’était « captable » par quiconque, laissant supposer à qui la connaissait réellement, qu’elle voulait se maîtriser entièrement.   La nocturne laissa le vampire prendre le contrôle de la situation, écoutant à peine la réponse qu’il fournit à l’enfant, Aurore elle, se releva difficilement une main sur son ventre plus par réflexe que par réelle douleur.  Se tournant vers Adrän elle finit enfin par s’excuser par réflexe, mais cette fois-ci elle devait vraiment sembler ailleurs, lointaine.

- «  Excuse-moi Adrän. »

« Le problème avec l’échec
c’est qu’il faut l’admettre et l’accepter »

Aurore observait les deux vampires sans grand intérêt, son regard était vide d’émotion et seul les préoccupations que son esprit lui imposait semblés avoir de la valeur à ses yeux.  Détaillant Adrän du coin de l’œil, la nocturne s’étonna intérieurement de la tenue de son compagnon, mais resta silencieuse préférant ne pas  demander plus d’explication pour le moment. Passant une main dans sa chevelure,  c’est à ce moment  que le jeune homme décida d’effleurer la joue de sa partenaire, rassurant légèrement la nouvelle née.  Le vampire continua à rassurer l’ancienne humaine, ajoutant la parole au geste, une fois l’explication terminé il l’embrassa avec tendresse, avant de lui murmurer des paroles pleines d’inquiétudes. Que pouvait dire la jeune femme ? Son questionnement était parfaitement fondé et si … Et si le père était mort, et si il refusait de récupérer l’enfant ? D’un léger hochement de tête, Aurore se contenta d’indiquer son désaccord, entrouvrant les lèvres et dans un souffle à peine audible la nocturne répondit avec un aplomb déstabilisant.

- «  Avec des si le monde pourrait être refait des milliers de fois tu ne crois pas ? Allons-y, nous verrons bien une fois la bas ? »

Sortant sans plus de délicatesse que ça des bras de son partenaire Aurore s’avança d’un pas vers l’enfant qui devait déjà faire face à une montagne de questionnement et d’inquiétude, imaginant le pire. Plongeant ses yeux dans ceux de la petite la créature de la nuit se contenta d’esquisser un sourire avant d’ajouter.

- «  Ne réfléchis pas à tout ça Eliane tu veux, je suis certaine que tout vas bien se passer, tu verras. Allons-y »

Aurore conservait un calme remarquable devant la gravité de la situation, ou plutôt elle exerçait une capacité de détachement importante. Alors que son état physique n’était pas des plus performants et que sa blessure était loin d’être complétement résorbée, la jeune femme restait maîtresse d’elle-même et captait la totalité des flux d’émotions présents dans l’environnement.  La vampire préférait estomper la souffrance des personnes l’entourant en augmentant ou plutôt en s’imposant le poids de la tristesse des autres. Il était rare pour Aurore de se servir de son don, surtout depuis sa transformation mais les récents événements l’avaient fait douter au plus profond de son âme de sa capacité à se contenir, à se maitriser et à ne pas mettre la vie de ses proches en danger. En se poussant à bout mentalement et physiquement elle espérait se punir, mais surtout se tester.

Se relevant calmement la nouvelle née se contenta d’ébouriffer la chevelure légèrement emmêlée de la môme, avant d’entamer une marche silencieuse vers la sortie de l’habitation. Le visage de la buveuse d’hémoglobine restait sans émotion, totalement neutre et son regard pétillant s’éteignait doucement. Tout était de sa faute, comme d’habitude, elle était un poids, une énigme et malgré tout le chemin qu’elle avait parcouru elle était incapable de comprendre pourquoi. Pourquoi avait-elle encore se don qu’elle pensait définitivement perdue, pourquoi était-elle incapable d’agir raisonnablement, pourquoi mettait-elle toujours en danger les personnes à qui elle tenait ?  

Poussant la porte principale d’une main lasse, elle prit la peine d’attendre ses deux compères  avant de la relâcher. Jetant un œil sur l’enfant, Aurore ressentit une légère satisfaction en observant que son don avait l’air d’être efficace. Eliane semblait étrangement sereine, bien loin de toute tristesse ou émotion négative, ce qui était très loin d’être le cas d’Aurore, qui pour une première fois utiliser son pouvoir et surtout avait l’intention de l’utiliser jusqu’à ne plus pouvoir contenir tant de sentiments.

- «  Je propose qu’on presse le pas si ça vous vas. Je vous abandonnerais certainement sur le chemin le temps de me nourrir, Eliane tu ne restes jamais toute seule. »

Le petit être hocha calmement la tête, signe qu’elle avait parfaitement compris et qu’elle ne souhaitait pas mettre en danger le groupe. Se tournant légèrement vers les deux personnes afin d’adresser un sourire qui se voulait rassurant, Aurore préféra garder le silence et se mettre en route. La buveuse d’hémoglobine avait conscience qu’après un manque d’entrainement et une fatigue physique aussi importante, elle ne pourrait pas tenir longtemps au niveau de sa magie, c’est pourquoi elle souhaitait arriver le plus rapidement possible.

La jeune femme avait conscience que la distance à parcourir n’était pas très grande, une nuit devrait suffire à éteindre l’habitation, l’unique interrogation restait celle de savoir si le père d’Eliane était encore en vie ou non.  La progression du groupe se poursuivait dans un silence qui commençait à devenir un peu pesant et c’est ce moment qu’Aurore choisit pour s’éclipser afin de se nourrir vérifiant avant tout  départ que l’enfant restait avec Adrän.

- «  Vous pouvez continuer à avancer nous ne sommes plus très loin je pense. Je vous retrouve dans très peu de temps. »

L’idée de la jeune femme était simple trouver une bête, une créature vivante afin de se nourrir avant de rejoindre avant Adrän et Eliane la maisonnette, certaine qu’il ne devait pas y avoir tant d’habitation que ça. L’unique chose qu’Aurore avait oublié, c’est qu’avec la distance elle perdrait le contrôle, l’estompage des émotions négatives de l’enfant.  Aurore trouva rapidement de quoi calmer la soif qui la tiraillait, elle prit même une seconde le temps  de souffler un peu et de remettre ses idées en place. La jeune place n’était plus vraiment elle-même, particulièrement atteinte par son comportement qu’elle ne reconnaissait plus, face à l’acceptation de sa faiblesse et du poids qu’elle apportait. L’avenir était encore bien incertain et rien ne semblait vouloir apaiser l’esprit désormais tourmenté d’une nouvelle née.

- - -

Après une seconde qui avait plutôt tourné en heure, Aurore se pressa pour retrouver le chemin de l’habitation mais surtout Adrän et Eliane qui devait commencer à s’inquiéter. Étonnamment c’est les flux d’émotions qui la guida jusqu’à eux avec une rapidité déconcertante, elle se contenta de s’infiltrer derrière le groupe l’air de rien, retrouvant un rythme plus lent et récupérant les flux d’émotions.

- «  Nous devons être bientôt arrivé non ? »

Esquissant un bref soupire, la jeune femme gardait toujours un léger détachement face à la situation, cherchant plus à comprendre et à trouver des solutions, sans inquiéter ou déstabiliser qui que ce soit.

Les pas d’Aurore frôlaient le sol avec une lenteur digne d’un escargot, son esprit était tourmenté par les reproches qu’elle s’imposait, par la culpabilité, par la non reconnaissance de sa propre personne. Elle n’était plus vraiment elle. La nouvelle née était assaillie par des envies meurtrières, par des envies  de sangs, de souffrances. Incapable de se contenir, de se canaliser, une émotion pouvait la faire sombrer sans qu’elle ne puisse lutter contre ce démon qui la dévorait, mais tout ceci l’avait fait grandir, évoluer à une rapidité déconcertante, faisant disparaitre l’adolescente pour laisser naitre la femme qu’elle devait devenir. Poussant la belle, dans ses retranchements, dans l’incompréhension.  Qui était-elle ou plutôt qu’était-elle devenue ? Un monstre, une créature des ombres, un vampire. Son regard s’assombrit en une fraction de seconde, alors que son partenaire lui annonçait que le groupe était bientôt arrivé à destination. L’ancienne humaine se contenta d’hocher la tête, forçant sa réflexion à rester silencieuse. Le plus important restait Eliane, cette jeune fille qui n’avait rien demandé à personne et qui avait quasiment tout perdue. Aurore s’avança forçant l’atmosphère à s’alléger, à devenir moins pesante, moins lourde.  Et c’est en sentant une petite main se glisser dans la sienne, qu’elle laissa son premier sourire se dessiner. Un grand domaine s’offrait au groupe,  une habitation particulièrement… imposante. Le soudain engouement de l’enfant vis-à-vis du lieu, ne pouvait être trompeur, ils étaient arrivés.

Seulement une chose clochait, un sentiment désagréable la fit frissonner et la main d’Adrän indiquant le silence ne la rassura absolument pas. Aurore se contenta de ralentir le rythme de la petite, s’agenouilla afin de déposer son doigt sur ses lèvres, la priant de rester silencieuse. Les jeunes gens reprirent l’avancement, beaucoup plus lentement, sans bruits, sans vies.  La porte était ouverte, ni par effraction, sans preuve de violence non plus, mais cela n’empêcha Aurore de faire marcher Eliane derrière elle. A peine la premier pas de la porte passé, une odeur de sang vint faire vibrer la créature enfouit dans le plus profond de l’être de la buveuse d’hémoglobine, provoquant un arrêt brutale de la marche.  Eliane déposa ses grands yeux sur la jeune femme qui ne put se résoudre à craquer maintenant, luttant, évitant de respirer afin de poursuivre la découverte.  Calmement, ou du moins le plus calmement possible, la jeune femme finit par pénétrer dans le domaine, accompagné de la douce enfant.

Adrän finit de par disparaitre brusquement du champ de vision de la belle, qui d’un geste brusque manque de se précipiter la bas, avant de sentir une petite main effrayé la tirer vers elle.  Aurore s’agenouilla une nouvelle fois, afin de la prendre dans les bras, entendant le cri plutôt rassurant, de son partenaire qui lui ordonnait de rester ou elles étaient.  La belle se contenta de lui murmurer que tout ce passerait bien, s’était l’intuition qu’elle avait, et étrangement Aurore le pensait sincèrement.  Une fois l’accord d’Adran, Aurore s’avança en ordonnant à la petite créature de rester cacher derrière elle et de ne regarder que ses jambes, ou le par terre mais rien d’autre. Observant l’individu, déplaçant son regard sur son physique, la belle manqua de s’effondrer face à la grande douleur qui se dégageait de lui.  Il n’était pas difficile de comprendre qui il était et ce qui le mettait dans cet état. Elle prit donc enfin la parole, s’adressant directement à l’homme visiblement prêt à s’éffondrer.

- «  Bonsoir. Nous venons juste vous rapporter quelque chose, vous n’avez rien à craindre de nous. »

Au fur à mesure qu’elle avançait dans sa phrase, Aurore fit passer très doucement la petite devant elle sans pour autant la laisser se précipiter dans les bras de son père. Il fallait y aller calmement, sans brusquer personne, le choc devait être aussi important pour l’un comme pour l’autre. Alors que les deux individus ouvraient leurs grands yeux remplis d’amour sur l’un puis sur l’autre, Aurore relâcha la petite qui se précipita en larme dans les bras de son père. Elle reprit alors la parole, simplement d’une voix tout aussi douce et calme, mais laissait paraitre de profond regret.

- «  J’espère que vous me pardonnerez un jour… Je n’ai pas pu sauver votre femme…  Je … n’étais pas à la hauteur. Mais je pense que je peux vous aider à oublier. »

D’un pas lent, Aurore s’approcha de l’image familiale, le père ne répondit rien, trop secoué par la retrouvaille de son enfant, de sa chair. Prendre la douleur n’était pas une chose facile, surtout de façon définitive et au fond la jeune femme ignorait si elle était capable d’une tel chose, elle l’espérait  pourtant de toutes ses forces.  Elle y avait réfléchis tout le long du chemin, sans en parler à personne. Elle avait analysé ses capacités, la façon dont elle parvenait à apaiser la douleur en augmentant la sienne et elle était arrivée à cette conclusion. Elle n’avait jamais su réellement utiliser son don. Mais depuis que ses sens étaient améliorer, elle ressentait encore plus fort, plus intensément, parvenait à s’insérer à comprendre la raison de chaque souffrance, à l’apaiser. Même si les répercussions sur sa personne étaient élevées, cela  ne l’importait plus, elle avait l’impression d’avoir trouvé la raison de son don. L’aide.  

Sa main glissa sur la joue d’Adrän, un léger sourire sur les lèvres. Ils avaient finalement réussi, Eliane allait pouvoir reprendre une existence normal ou presque. Elle laissa le père et la fille, s’effondrer ensemble, cela devait être important pour eux. Elle en profita pour simplement, laisser sa main glisser dans celle d’Adrän, sans pour autant lui expliquer ce qu’elle voulait faire. Persuadée qu’il ne la laisserait pas faire, qui laisserait faire la personne qu’il aime une expérience qui pourrait être dangereux, sans avoir une seule idée des répercussions qu’elle pouvait avoir.  Il fallait être irresponsable ou fou, ce qui devait être au fond un peu le cas d’Aurore. Pourtant, cette fois, elle y avait longuement réfléchis et cela lui semblait l’unique solution pour offrir à cette famille, un nouveau départ. Elle murmura doucement à l’oreille de son partenaire :

- «  Tu devrais peut-être faire le tour du domaine, je préfère être certaine qu’il n’y a pas de danger pour eux avant de repartir. Tu trouveras peut-être de quoi te nourrir en plus. Je reste là, comme ça personne ne risque rien. »

Terminant sa phrase, elle vint déposer ses lèvres sur celle de son tendre, mettant ainsi fin à la discussion et aux négociations inutiles. Après un petit moment de tendresse, il finit par accepter l’idée de faire un tour et disparut de la vision d’Aurore et de la petite famille. Inutile pour elle de savoir, s’il était loin ou pas. De toute façon il ne pourrait plus lui faire changer d’avis. S’agenouillant, Aurore reprit la parole vis-à-vis de la fille et du père. «  Je vais … essayer de vous faire oublier. Pas les bons souvenirs évidements juste… le moment dramatique… Faites-moi confiance. » Si une chose était certaine dans la logique d’Aurore, c’est que pour que son pouvoir fonctionne elle devait pouvoir regarder la personne qu’elle ciblait, il lui fallait donc trouver un moyen pour que le don persiste même sans contacts. Et c’est là que l’idée du sang lui sembla la meilleur solution, certaine groupe utilisait le pacte de sang pour sceller un contrat. Il s’agissait un peu d’agir de la même façon. Elle attrapa donc un morceau de verre trainant non loin avant de s’entailler un doigt d’une profondeur suffisante pour faire couler son sang. Devant le regard, inquiet du père, c’est Eliane qui le rassura lui murmurant, que s’était Aurore qui lui avait sauvé la vie et qu’elle ne ferait rien de mal. Il se résigna donc à lui offrir à son tour son doigt, qu’elle entailla de façon beaucoup plus superficielle, avant de passer à celui version miniature de l’enfant. Mélangeant les différents sangs, la jeune femme ferma les yeux, tout en gardant un contact physique avec les deux personnes. Ce fut particulièrement douloureux pour elle, de sentir autant de souffrance d’un coup, d’un trait et inutile de penser à la rapidité plus qu’elle ignorait comment faire ignorer une personne, un événement à d’autre.

Elle se contenta de re-visualiser la scène, cette mort, ce démon qui l’avait fait commettre l’irréparable, et la douleur qu’elle ressentit n’en fut qu’augmenter, à tel point qu’elle fut obligée de rompre le contact et de se reculer. S’était un peu comme-ci une personne tentait de l’étouffer, comme-ci une multitude de lames étaient en train de la transpercer sur la totalité de son corps, elle se releva brusquement, manquant de chuter, observant sa vision se troubler. Cherchant son air, cherchant à remplir ses poumons pourtant morts depuis plusieurs cycles, elle longea les murs, entendant des paroles raisonner dans sa tête, des Aurore, des vous allez bien. Mais rien, rien elle ne parvenait pas à se soulager, elle finit par réussir à passer la porte, à sortir, cherchant toujours autant son oxygène son air. Les deux êtres l’avait suivis, sans pour autant comprendre l’étendue des dégâts. Elle finit par chuter sur le sol, incitant le groupe à s’éloigner de gestes de mains flou. Sa respiration était particulièrement forte, comme quelqu’un était en train de faire une crise d’asthme, ou d’agoniser. Ses mains resserrèrent le sol, enfouissant tout sa douleur emprunté avec force dans la terre si froide. Avant de s’évanouir, de perdre connaissance, vacillant entre l’état de conscience et d’inconscience.  Elle avait finalement juste besoin de sommeil, d’un peu de sommeil.

Et c’est la petite qui se dépêcha de courir rechercher Adrän, pendant que le père la portait pour la ramener à l’intérieur. Eliane raconta la totalité des événements aux vampires, dans les moindres détails en rajoutant certainement un aspect dramatique à la situation, comme les enfants savent si bien le faire. Aurore, elle, était finalement profondément endormie, son corps frissonnant ou chauffant, comme-ci elle était atteinte de température ou d’une maladie.  Elle venait d’accomplir pour la première fois de sa vie entière une chose remarquable, une chose irréalisable. Faire oublier une émotion, un événement en prenant la souffrance pour la replacer de l’apaisement. Même  si la douleur, la souffrance et les sensations qu’elle avait ressenties étaient particulièrement difficile à endurer, elle avait réussi. Et le père et la fille devait avoir l’air plus serein et apaiser de toute leurs souffrances.  Un mal pour un bien.