Messages : 8 Alignement : Neutre En couple avec : Elaën Nerildillë, mon ange Ennemis : tout le monde il est gentil!
Sujet: Here without you Mar 29 Oct 2013 - 0:22
Here without you
Il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour. - Pierre Reverdy
• Ardamir, la Cité des Elfes • Elaën & Sinis
La Distance, le mal de l’Absence et l’Ennui régnaient maintenant sur ma vie. Je restais sans trop bouger, les nausées me montant rapidement à la gorge. Assise sur mon lit, j’avançais des ouvrages tricotés ou cousus : petits bonnets, minuscules pantoufles, vestes en taille réduite, tout pour la saison froide. Puis, ma patience mise à rude épreuve, je finissais toujours par lancer aiguilles et patrons à travers la pièce. Je me repliais à la tête de lit, et, couchée sur les oreillers, je me roulais le plus possible en position fœtale, les cuisses appuyant légèrement sur mon ventre un peu bombé. Les draps n’avaient même plus son odeur. Alors je fermais les yeux, et je me remémorais les souvenirs d’un autre temps.
Je me rappelais mon arrivée à la capitale, pauvresse que j’étais, quittant la forêt luxuriante pour les montagnes, que je pensais désolées. Je n’étais jamais sortie de chez moi à cette époque, et tout était nouveau. Je connaissais la terre, les aiguilles et les pommes de pin lors de mes trop rares désobéissances quand j’essayais de m’évader de la pression de ma famille. Mais mon foyer avait brûlé. Comme en rappel à cette funeste soirée, il n’était pas rare que je caresse le cercle de chair brûlée et jamais totalement guéri autour de ma cuisse droite.
L’affamée que j’étais s’était retrouvée à moitié morte dans les rues, ignorée de tous, avec juste son arc pour témoigner de sa caste. J’avais un instant songé à le vendre, avant de très vite renoncer à cette idée. C’était encore la seule chose avec laquelle je pouvais m’illustrer, étant donné l’excellente vue des elfes. La vue justement… Quel merveilleux don en soit. Une qualité propre à chacun, car nous percevions tous les couleurs différemment. Si tout le monde trouvait un vert étincelant, personne ne voyait le même. Nous voyions également les intensités lumineuses différemment. D’après certaines théories -que je n'avais jamais vérifiées-, les yeux aux iris clairs seraient plus sensibles que les iris foncés. Cette jolie petite capacité présente chez quasiment tout le monde et pourtant unique était reliée au cerveau. Des images faisaient pleurer, d’autres émouvaient, nous révoltaient, nous faisaient sourire,… La personne que j’avais vue en premier lieu en arrivant dans la ville, ce bel elfe si richement vêtu, m’avait fait l’effet d’un coup de poignard. Il symbolisait le pouvoir que j’avais perdu, la richesse qui m’avait été retirée, la beauté noyée dans l’horreur de la nuit. Et pourtant, malgré la colère, je l’admirais. Il était la personne que j’aurais aimé devenir, entourée et aimée, car il respirait l’affection. Des émotions trop vives avaient achevé le peu de ressources qu’il me restait. Je m’étais effondrée au milieu de la rue, sous ses yeux, ses yeux qui m’avaient vue d’une façon unique.
Je m’étais réveillée chez lui, veillée par ses soins. Je me souvenais des fous rires, des blagues, de son sourire, pendant ma convalescence. Nous étions inextricablement liés. Pourtant, je ne supportais pas la ville : trop de monde, trop d’émotions qui n’étaient pas les miennes. J’étais à la merci de la première personne en colère qui frôlait la maison d’un peu trop près. Je n’avais jamais été violente, mais très changeante, et je suppose que c’était un peu déroutant pour Elaën, à qui je n’avais pas confié le secret de mon don –ou de ma malédiction, suivant les versions. Quand j’avais été suffisamment rétablie, j’avais regroupé mes maigres affaires –mon arc et mon carquois-, et après des adieux et des remerciements qui s’étendaient en longueur, j’avais fuis. J’étais partie aussi vite et aussi loin que possible, j’avais regagné la forêt, mon ancien foyer. J’avais dormi entre les racines d’un chêne certainement plusieurs fois centenaire vu l’épaisseur de son tronc, je m’étais nourrie de baies, je m’étais complètement isolée, mais je regrettais cette décision. La nuit, je faisais des cauchemars de pyromanie. C’était moi qui mettais le feu à notre village, et j’étais la seule à m’en sortir. La forêt que j’avais cru être un refuge m’était devenue hostile et sans pitié. Je ne pouvais décemment plus vivre dans les bois. Alors la capitale redevint ma destination. A pied, je mis plusieurs jours avant de l’atteindre. Enfin, je le retrouvai. Les jours passèrent, on s’entendait de mieux en mieux, et enfin, il me demanda en mariage. Cependant, je savais dès le début que c’était un elfe qui donnerait sa vie pour la paix dans son pays, alors quand la première guerre éclata et me le ravit, ce ne fut pas un grand choc. Mais refusant de m’apitoyer sur sa disparition soudaine, j’avais pris ma vie en main, je sortais d’avantage, me faisais de nouveaux amis. Je devenais indépendante et chaque jour qui passait me séparait un peu plus d’Elaën. Le jour, je ne pensais quasiment plus à lui, mais dès que le soleil se couchait, ma bonne volonté sombrait avec lui. Il me manquait affreusement, j’avais mal, d’une douleur physique et mentale. C’était partout et nulle part, une énorme aiguille qui transperçait douloureusement le corps avant de disparaître subitement. Il me manquait, et chaque cellule en souffrait. Je n’étais pas seule, il y avait le cuisinier qui préparaient toujours d’excellents repas, la gentille mi-humaine, mi-elfe qui faisait le ménage et avec qui j’adorais discuter de tout et de rien –elle était de très bonne compagnie-, mes amis aussi, mais rien ne remplaçait mon Elaën le soir dans mon lit. J’avais froid sous la plus douce des températures.
Enfin, il revint de sa guerre. Ma joie éclata, mais ce n’était plus l’elfe que je connaissais. Il était revenu las et taciturne. J’avais remarqué, trop tard, qu’Elaën était mort là-bas. Je ne le faisais sourire que trop rarement avec des enfantillages, des paroles insensés ou des gestes témoignant de ma gaucherie. Je ne me laissai pas abattre, si le corps était revenu, l’âme ne devait pas être très loin. Je m’étais promis de le retrouver. La guerre avait été un choc pour tous, mais je savais qu’il pouvait le surmonter. C’était Elaën, que diable ! Et il aurait pu remonter la pente, si cette seconde guerre n’avait pas éclaté. Ravi encore une fois à mes tendres affections, le chef de Cavalerie était reparti avec Histe. Peu après, en voulant me rapprocher un peu de lui, j’ai obtenu ma propre monture, Onyx, un jeune étalon Barbe gris moucheté. J’avais commencé à la monter et à le dresser. Notre lien était tissé, mais la confiance ne demandait qu’à grandir chaque jour un peu plus. J’avais travaillé à pied, lui apprenant à venir quand je sifflai. C’était la condition pour qu’il ne soit pas constamment attaché ou enfermé. Il avait compris le principe, surtout avec la pomme dans ma main s'il obtempérait. Je lui avais appris quelques tours, comme monter des marches, ou ne pas avoir peur de l’eau, cabrer suffisamment pour effrayer, mais pas assez pour me désarçonner ni risquer de se retourner et de tomber sur le dos et moi avec lui, des demi-tours sur les hanches pour fuir rapidement, des déplacements latéraux –juste pour la beauté du dressage cette fois-, et beaucoup d’autres choses. Il comprenait vite, mais il restait encore un long chemin à parcourir : monter des marches, oui, mais pas plus de trois, si l’eau devenait trop profonde, je perdais tout contrôle, lorsqu’il cabrait, il pensait rarement à moi, les demi-tours sur les hanches se transformaient en changement de sens sur les épaules, ce qui en soi n’était pas important, mais je préférais garder le moteur du mouvement au centre et que d’une poussée de croupe nous repartions plus rapidement. J’aimais le dresser comme si la guerre était à nos portes –ce qui, dans un sens, n’était que pure vérité.
Mais le temps passa et je finis par me lasser. Les exercices étaient répétitifs, et je n’avais plus l’envie ni même la patience d’en imaginer de nouveau. Je laissai tomber et appelai mon cheval de moins en moins souvent, gardant tout de même le contact avec lui. Cependant, je dormais plus longtemps, je mangeais de moins en moins, et, plus inquiétant, je fus prise de nausées. Alors je restais enfermée dans ma chambre, à écouter le temps s’égrener sans y participer. Jusqu’au jour où, par hasard, des enfants vinrent jouer en bas de chez moi. Trois jeunes elfes, de 40 ans tout au plus, folâtraient bruyamment sous la fenêtre de la chambre, sous le regard consterné de leurs parents. Ce fut un déclic. J’étais restée enfermée trop longtemps pour que ce soit une simple maladie, et surtout, les nausées ne me prenaient que par moments relativement précis dans la journée. Je savais ce qui se passait, je comprenais pourquoi j’avais commencé à prendre du poids alors que je mangeais peu. C’était à partir de là que je commençai la couture et le tricot. Mais je n’étais ni douée de mes doigts, ni patiente, alors je me trompais, recommençais, refaisais une erreur, reprenais une fois encore, et puis je m’apercevais que ce que je faisais ne ressemblait à rien, et surtout pas au modèle, alors je laissais tout bonnement tomber.
Puis un matin, on me monta une lettre. Mais pas n’importe quelle lettre : elle venait du front. Oh non ! Il était arrivé malheur à Elaën ! Il ne serait jamais au courant ! Qu’allai-je faire, maintenant ? Mes mains tremblaient quand je retournai la lettre pour l’ouvrir. J’avais une boule dans la gorge, un pincement au cœur, les larmes aux yeux. L’enveloppe m’échappa et glissa sur la couverture blanche du lit. Je n’osai pas l’ouvrir, je ne voulais pas voir la terrible nouvelle. Rongée par le remords, envahie par le désespoir –quel doux euphémisme-, je m’éloignai de la lettre marquée du sceau de la tristesse.
Je vins me coller au mur, et j’observai l’enveloppe de loin. Les mâchoires crispées, les poings serrés, j’essayai vainement de me convaincre que ce n’était qu’une feuille de papier, que les mots écrits n’étaient que des lettres sans âme ni profondeur. Doucement, je m’approchai de l’objet. Pour toute personne autour, il aurait été curieux de me voir procéder ainsi, comme si je ne voulais pas effrayer une bête sauvage par un geste brusque. Finalement, avec mille et une précautions, je m’emparai du papier, et l’ouvris précautionneusement.
La lettre était courte, tout au plus une dizaine de lignes. Elle ne m’annonçait pas la mort de mon tendre et cher, non, bien au contraire : il revenait à la maison ! Bon, il était blessé, et suffisamment pour qu’on ne le laissât pas se battre. Son égo avait dû en prendre un sacré coup. Mais… Le doute m’assailli. Dans quel état reviendrait-il ? Et surtout… Qu’allait-il dire quand je lui apprendrais la nouvelle ?
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Sujet: Re: Here without you Dim 17 Nov 2013 - 1:28
Here without you
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• Ardamir, la Cité des Elfes • Elaën & Sinis
En apprenant la nouvelle du retour de mon fiancé, je fus submergée de joie à l’état pur. C’était comme si le poids des jours, des semaines qui s’étaient écoulées quittait enfin mes frêles épaules de femme enceinte pour retourner au néant. J’étais ravie, et à grandes occasions, grandes préparations ! Je demandai à ma « suivante » (diantre que je détestais ces mots ! Mais bon, c’était toujours plus flatteur que le terme de « servante », qui, lui, aurait totalement été sorti du contexte car j’adorais les quelques personnes de ma maison, surtout Océane) de changer les draps, et de faire un brin de ménage avant de m’aider à me préparer. Même si je savais m’habiller seule, noblesse ou pas, je manquais cruellement d’esthétique. C’était quelque chose qu’on ne m’avait jamais appris. A deux, nous parvenions à peu près à me donner bonne allure, mais ce n’était pas sans mal.
Devant la coiffeuse dans un coin de la chambre, je m’assis sur un tabouret pendant qu’Océane peignait mes cheveux avec douceur. Le peigne d’argent avait quelque peu du mal à venir à bout des nœuds formés par de nombreux jours sans brossage. Quand enfin elle put y passer les doigts sans difficultés, elle en fit une tresse depuis le haut du crâne, et déviant au niveau de mon épaule gauche pour venir se poser délicatement au niveau de ma clavicule, ceint par un élastique couleur perle. Des mèches bouclées s’échappaient çà et là, minutieusement choisies pour donner un effet de désordre soigneux. C’était une coiffure relativement aguichante de mon point de vue. Pourtant, elle sourit, fière de son œuvre, et me demanda d’attendre. Elle sortit, puis deux ou trois minutes après revint avec une plume de paon, trouvée je ne savais où, et là piqua dans mes cheveux, au niveau de ma nuque.
Lorsqu’elle me proposa du maquillage, je déclinai poliment. Je refusais d’être couverte de trop d’artifices. Je n’étais pas une toile de peintre, j’étais avant tout quelqu’un de naturel. Océane fouilla mon placard en quête d’un vêtement approprié. Elle dénicha une robe que j’avais depuis longtemps oubliée. La dernière fois, je l’avais portée à notre lune de miel, à Elaën et moi. Ma robe de mariée avait été relativement fastueuse, comme je l’avais toujours imaginée. Celle-ci aurait aussi pu convenir, mais elle m’avait servi pour autre chose. Elle était blanche, et même avec le temps écoulé, elle restait éclatante. Le corset était semi-rigide, de sorte que je pouvais aisément respirer et que je n’étais pas trop serrée. Il était brodé de perles irisées minuscules qui scintillaient à la lumière, suivant le tracé des baleines du décolleté, qui laissait entrapercevoir une partie de ma poitrine, jusqu’à la taille, comme une rivière de diamants. Une arabesque ressemblant à celle sur mon visage, dans une teinte plus argentée que blanche dansait sur ma hanche droite. Au-dessus, sur les épaules, de la dentelle était cousue sur de la mousseline transparente, cette dernière étant utilisée pour les manches. Au niveau de mes coudes, on retrouvait de la dentelle dès que l’ouverture s’évasait, et ce, jusqu’à mes poignets. Sa jupe de satin descendait jusqu’à mes chevilles. Elle n’était pas très ample pour faciliter mes mouvements, mais pas trop près du corps non plus, de sorte qu’on ne devinait pas mes jambes en dessous. Pour parfaire le tout, Océane me tendit un cadeau inestimable : le collier de mon enfance, cédé par ma mère quand j’avais atteint mes 50 ans et que je sortais de l’enfance. C’était un bijou près du cou, fait de petits cercles rose et bleu pâle, avec au centre en guise de pendentif une fleur de même couleur, aux pétales entourés de perles blanches. En soit, il n’était pas précieux et n’avait aucune valeur. Cependant, il était des plus important à mes yeux, car venant de ma mère. Aurait-elle été fière de me voir le jour de mon mariage ? Il n’y avait personne que je connaissais. Je m’étais beaucoup amusée, même si j’étais entourée d’étrangers : ç’avait été l’un des plus beaux jours de ma vie.
Ensuite, ce fut l’effervescence. Je ne savais plus quoi faire pour tuer le temps. Alors je vadrouillais dans la maison, de haut en bas, de droite à gauche, et inversement, de long en large, en travers et en diagonale. Je ne touchais à aucun objet, je ne faisais que marcher dans ma robe blanche, les mains dans le dos. Je m’asseyais, je m’allongeais, me relevais, faisais quelques pas, abandonnais, me perdais dans mes pensées au milieu de la pièce à vivre ou dans la salle de bain. Radical ! Je pensais à lui, à la nouvelle que je devais lui annoncer. Comment devais-je m’y prendre ? Lui dire mot pour mot ? Le suggérer ? Ne rien dire du tout et attendre qu’il s’en rende compte ? Je commençais à avoir quelques rondeurs, mais elles n’étaient pas tellement visibles sous le corset. Il était partit depuis si longtemps !
Un détail me revint en mémoire : il s’était fait blesser au combat. Dans quel état allait-il revenir au juste ? Je l’avais déjà perdu une première fois lors d’une bataille dans laquelle il y avait eu de nombreuses pertes elfiques. J’avais eu si peur de le perdre… Il était tout pour moi, celui à qui je devais énormément de chose, celui à qui je devais ma vie. Sans lui, je n’aurais plus rien été. Il m’avait manqué, ce bougre ! Je voulais juste revoir le Elaën que je connaissais, l’elfe que j’avais rencontré, si majestueux, si sûr de lui, si protecteur, et pas l’ombre qu’il était devenu. Il m’avait été retiré deux fois. Sans aucun doute il le sera encore. Mais je ne pouvais plus me résoudre à le laisser partir sans rien dire. La prochaine fois… Oui, la prochaine fois, je partirai avec lui. C’était avec l’âme chargée de détermination que je regagnai encore une fois le salon. Je me plantai devant la porte. Il était là. Il était enfin de retour.
-Bonsoir, ma tendre et chère épouse. Je suis… revenu…
Il était doux, mais terriblement crispée. L’avais-je perdu à nouveau ? Je n’osai pas le croire. Pleine de toute l’admiration et du profond respect que je lui vouais, je baissai les yeux, et agrippant ma robe, je la soulevai légèrement en pliant les genoux dans une révérence polie. Je n’étais pas d’un naturel à respecter les règles de la noblesse, même si je les connaissais par cœur, mais j’avais toujours le tic de faire une révérence à quiconque franchissais la porte (enfin seulement ceux qui venaient en amis ; les malotrus qui osaient s’inviter n’avaient droit qu’aux coups de balai administré par la poigne de fer de ma douce Océane !). Je me relevai, et le regardant droit dans les yeux, je souris.
-Tu es de retour !
Le ton soulagé de ma voix n’était nullement feint, j’étais réellement heureuse de le revoir, et le sourire étirant mes lèvres devait en dire long.
-C’est magnifique, tu vas être p…
Je plaquais mes mains sur ma bouche. Après un simple bonjour, c’était sans doute un peu rapide. Avec un sourire d’excuse, je m’avançai vers lui, et le prit par la main, le conduisant à un fauteuil pour qu’il s’asseye. Je le poussai délicatement, ne voulant pas lui faire mal là où il s’était blessé. Je cherchais dans son regard si c’était le bon moment ou non.
-Elaën… Ca faisait si longtemps que… Je me suis inquiétée ! Et… Enfin… Est-ce que tu vas bien ? Hum… Je voulais te dire…
Je pris ses mains dans les miennes. Je ne savais pas comment m’exprimer. C’était devenu quelque peu familier depuis son retour de sa première guerre. Je pesais chaque mot avec précaution, pour ne pas le froisser. Je ne trouvais pas l’approbation que je cherchai désespérément. Il était juste vide, à nouveau.
Un peu déçue, je le lâchai et me retournais. Les larmes me montaient aux yeux, et je n’avais pas le droit de pleurer. Mon rang m’en empêchait, mais même avant ça, mon égo s’en serait retrouvé blessé. Peut-être en faisais-je toute histoire, mais j’avais besoin d’être rassurée. Je sentis mes épaules sursauter à cause d’un sanglot étouffé. Je relevai le menton et regardai droit devant moi. Je pris une grande inspiration pour me calmer et serrait mes poings, que je pris la précaution de cacher sous mes manches. Mes ongles entamèrent quelques peu la chair de mes mains.
De nouveau, je fis face à Elaën. Sans le regarder dans les yeux, je m’arrêtais sur ses mains. Je baissai les yeux face à mon mari. Après tout, je lui devais obéissance et respect, dans la plus stricte soumission.
-Elaën… Bon, je sais, ça fait juste deux fois que j’essaie de commencer mon explication de la même façon. Mais… Quand tu es revenu de ta précédente guerre, le seul moment où je te retrouvais un tant soit peu, c’était quand nous n’étions que tous les deux, sans craindre d’être dérangés. Alors tu te détendais un peu, tu étais plus souriant et… Je suis désolée… Je ne sais pas si c’est bien ou pas, je ne sais pas comment te le dire, mais il faut que ça sorte parce que… Parce que c’est la nouvelle la plus importante de ma vie, et peut-être de la tienne. Enfin je ne sais pas mais…
J’eus des picotements dans le nez. Cette fois-ci, les perles salées roulaient sur mes joues. Je ne savais même pas pourquoi je pleurai : de joie pour le bébé, de tristesse de ne plus le reconnaître, de reconnaissance pour qu’il me soit revenu, de peur de le perdre après ?
-Tu vas être papa… Elaën, je suis enceinte.
De nouveau, je redressai un peu la tête pour guetter sa réaction dans ses yeux. Je n’avais pas la moindre idée de sa réaction à venir, et c’était ça le plus terrifiant. Il pouvait partir, là, maintenant, se lever, passer le pas de la porte, et partir. Je ne lui en aurais pas voulu. Je n’aurais même pas réagit. Enfin même s’il régissait positivement, je n’étais pas sûre de pouvoir encore réagir.
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Sujet: Re: Here without you Mar 24 Déc 2013 - 19:06
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Il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour. - Pierre Reverdy
• Ardamir, la Cité des Elfes • Elaën & Sinis
J’avais tant hésité, tourné et retourné la nouvelle dans ma tête. Elaën papa, quelle grande nouvelle ! Et moi, j’allais… J’allais être maman ? Je chassais vite cette idée de ma tête, je ne pouvais pas me permettre d’y penser à l’instant. Cependant, cette idée reviendrait rapidement et prendrai une grande part de mes réflexions.
-Tu vas être papa… Elaën, je suis enceinte.
Il y eu quelques secondes de flottement. Elaën semblait vide de tout, complètement passif. Ni joie ni tristesse ne parurent sur son visage. Je n’avais pas plus d’informations qu’au début. Je crus un instant que c’était une mauvaise chose que j’attende son enfant. Je me mordis la lèvre inférieure, jusqu’à ce que le goût métallique du sang envahisse ma bouche.
Il releva enfin la tête vers moi, plus surpris qu’autre chose, puis m’adressa un sourire crispé. Autrement dit, il n’était pas des plus engageants avec moi. C’était une véritable torture. Le fait qu’il ne dise rien ne faisait qu’accentuer la chose. Après une grande inspiration, il toussota pour prendre la parole. Je faillis défaillir, de peur que ce qu’il m’annonçât ne fut en rien ce à quoi je pouvais m’attendre dans mes rêves certainement trop mièvres pour quelqu’un comme moi.
-Je ne sais que dire de cette nouvelle, ma chérie. Elle tombe à point nommé et je ne puis exprimer mes sentiments à l’idée de savoir que nous allons prochainement connaître la joie d’avoir une progéniture. Ainsi donc la lignée ne s’éteindra guère…
« Je ne sais que dire »… Eloquent non ? Quand quelqu’un dit pareille chose après une annonce aussi… capitale, ça met quand même le moral assez bas. Mais il se rattrapait assez bien après. « La joie d’avoir une progéniture » : terme que je trouvais un peu barbare. J’avais plus l’impression d’être une poule pondeuse qu’une elfe enceinte à ce moment-là. Le pire, c’était bien sa dernière phrase : « La lignée ne s’éteindra pas ». J’étais offusquée ! C’était tout ce qui lui importait, la lignée et l’honneur d’avoir une poule pondeuse comme femme ?! Ra les elfes ! Tous les mêmes ces hommes ! Un jour, il faudrait leur enseigner le tact, la délicatesse et les tournures de phrases adéquates en de telles circonstances ! C’était juste dégradant…
Il se leva et mit un genou en terre, grimaçant à cause de sa nouvelle blessure. Toute animosité me quitta et céda le pas à la tendresse. Il avait souffert, pour sa partie, mais aussi pour me protéger. Il était heureux à sa façon, et même s’il n’avait pas choisi les bons termes, à mon sens, ils venaient du plus profond de son cœur de fier guerrier. Il leva les yeux sur moi, ma main dans la sienne, et reprit la parole, avec une gravité qu’il gardait en général uniquement pour les évènements importants et surtout officiels.
-Ma douce Sinis, j’aurais préféré que tu m’annonces cette nouvelle dès mon arrivée parce que je ne puis nier le fait que tu aies autant interrompu tes dires ne m’a guère plu… Mais passons… Je te dois des excuses également. Ces guerres sont terribles mais je ne puis m’empêcher de m’y rendre car je n’ai point le droit de laisser mes soldats et en tant que chef, j’ai l’obligation formelle de les mener et cela jusqu’à la mort si c’était une opportunité... Néanmoins, je ne pourrais supporter que notre futur enfant soit orphelin de père et je te promets de trouver un juste milieu entre ma vie personnelle et mes obligations militaires. Je ferais toujours mon devoir de protéger Evanya, même si ce serait au péril de ma propre vie.
Je l’avais donc mis en colère ? J’aurais bien aimé l’y voir lui, à annoncer au combattant à la fierté en baisse à cause d’un manque de combat, qu’il était enceint ! Bizarre comme tournure de phrase quand même… Je m’imaginais un instant Elaën en hippocampe, et ne pus retenir un sourire amuser de danser sur mes lèvres.
Pour la suite de son discours, ce n’était pas vraiment la réponse que j’avais espéré. J’aurais préféré qu’il laissât l’armée de côté le temps de ma grossesse, qu’il restât avec moi. Il avait déjà passé tant de journée loin de moi… Je me sentis un peu nauséeuse de savoir qu’il comptait non pas mettre sa carrière en pause, mais conjuguer les deux. Je dus regarder ailleurs, e à mon avis, il le remarqua. Je ne voulais plus qu’il aille se faire tuer sur un champ de bataille ! Quand allait-il comprendre que je vivais chaque jour dans la peur qu’une lettre ou un messager ne m’arrive en m’annonçant la pire des nouvelles ?! Mes yeux se remplirent de larmes que je contenais tant bien que mal. Il était tellement borné ! Mais je ne pouvais pas lui en vouloir. De nouveau, je baissai les yeux sur lui. Sans doute devaient-ils briller et, sans parler, il comprendrait mon point de vue.
-C’est une nouvelle des plus importantes pour nous et j’espère, au nom des Dieux, que nous deviendrions de bons parents.
Il baisa mes doigts, mon front, mes lèvres. Je ne pouvais pas rester de marbre et lui rendit rapidement son baiser. Lorsqu’il s’assit, je sus que c’était à moi de prendre le relais et de donner ma réponse. Comment pouvais-je lui faire comprendre ? Je savais bien qu’il ne pouvait pas laisser ses hommes derrière lui, alors je me résignai. Fuyant son regard, baissant la tête, je déclarais d’une voix presque inaudible :
-J’espère, au nom des Dieux, que tu seras là pour voir ton enfant grandir. J’espère que tu seras là lorsqu’il prendra sa première bouffée d’air, à chacun de ses anniversaires, que tu le verras grandir. J’espère que…
Ma voix se brisa de douleur, je dus m’adosser à la table.
-Ces gens dehors, ceux contre qui tu te bats pour protéger notre monde, eux ne chercheront pas à savoir si tu vas devenir père ou non ! Tu n’es que de la chair à canon, un elfe à abattre. C’est mal, j’en ai conscience, mais j’étais heureuse que ta blessure t’oblige à revenir ici. Je sais que ce n’est pas ce que tu veux entendre, je ne suis pas stupide. Tu veux mener du mieux possible vie de famille et vie professionnelle, mais tu sais d’avance que c’est impossible. Parce qu’un autre jour, tu seras rappelé à la guerre. Tu n’as qu’une vie, Elaën, et si les Parques coupent le fil… Je connais tes intentions de devenir Gardien de la Nature, mais celles-ci ne te protègeront pas, bien au contraire. Dans un camp ennemi, on cherche le meneur, car sans chef, le reste de la troupe se disperse et rend les armes. Je t’aime, et je sais que je ne te changerai pas.
Je me penchai vers lui et embrassai ses cheveux. Dans un sanglot retenu, l’enlaçai doucement ses épaules, craignant de toucher sa blessure. Après une courte étreinte, je me redressai. De nouveau, je me mordis la lèvre, puis fit demi-tour avant de monter précipitamment dans la cambre. Je ne voulais pas qu’il voit -encore- mes faiblesses. Je ne pouvais pas pleurer devant lui, parce qu’il m’avait inculqué une valeur : la fierté. Désormais, il connaissait mon point de vue.
Je me précipitais dans notre chambre, et, laissant la porte ouverte derrière moi, m’allongeais précautionneusement sur le lit, dos à l’ouverture. Des larmes silencieuses coururent sur mes joues, traçant deux sillons humides qui goutaient sur le drap.